Politique
Soudain, l’été dernier
22.10.2021
Cet article a paru dans le n°117 de Politique (septembre 2021).
La Belgique compte ses premiers morts climatiques. Ils ont été emportés à la mi-juillet par les crues exceptionnelles de l’Ourthe, de la Vesdre et de la Meuse. De nombreuses maisons et infrastructures ont été endommagées voire détruites, laissant des habitants désemparés. Il faudra des années et des millions d’euros pour reconstruire les villages sinistrés. Les pluies tombées sur le sud du pays et l’Allemagne ne constituent « que » la partie belge d’un réchauffement global de la Terre. Une partie d’un tout qui semble désormais moins lointain.
Dans une étude publiée le 23 août dernier, trente-neuf scientifiques du World Weather Attribution, parmi lesquels l’IRM, ont établi le lien entre les inondations de la mi-juillet et le réchauffement du climat. Pendant ce temps, la calotte glacière du Groenland fond irrémédiablement, et le Gulf Stream, ce grand régulateur du climat de l’Europe occidentale, ralentit.
Depuis le milieu des années septante, les experts du climat alertent pourtant les responsables politiques du monde entier sur l’urgence à limiter le réchauffement de la planète. Ils le font infatigablement. Le sixième et dernier rapport en date du Giec en est une nouvelle preuve : si le réchauffement climatique atteint 2° plutôt qu’1,5°, les phénomènes climatiques exceptionnels vont s’intensifier, 420 millions de personnes connaîtront des canicules extrêmes et jusqu’à 80 millions de personnes supplémentaires seront menacées par la famine à l’horizon 2050.
En 2015 à Paris, les parties avaient acté la nécessité de limiter la hausse de la température terrestre et s’étaient engagés à prendre des mesures pour limiter les émissions de gaz à effet de serre qui en étaient responsables. Las. Les signataires de l’Accord de Paris, même quand ils prennent des engagements, sont lents à les traduire par des actions. Les impacts extrêmes de la hausse du climat pourraient pourtant être limités si ces accords étaient respectés et la neutralité carbone atteinte en 2050.
Mais chacun sait qu’avec des « si », on mettrait Paris en bouteille. L’heure n’est pourtant plus aux atermoiements mais au courage et à l’action, pour la planète, pour nos générations futures, ces enfants, parfois moqués, qui manifestaient leur colère dans les rues avant la pandémie.
Dans ce contexte, le pacte vert européen est ambitieux, assorti d’une feuille de route permettant d’atteindre la neutralité carbone en 2050 en passant par une réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990. En juillet dernier, les paroles ont été suivies d’actes. La Commission européenne a présenté un important paquet législatif concrétisant le basculement vers une économie plus verte. Il comporte notamment la fin des voitures diesel et essence, la taxe kérosène pour le secteur aéronautique, voire la création d’une taxe carbone aux frontières européennes.
Ce paquet va immanquablement susciter d’âpres débats avec le Parlement européen, les États membres… et les lobbys. La Commission vise son adoption en 2023, si tout va bien. L’Union européenne portera ses ambitions à la COP26 organisée en novembre à Glasgow. Elle doit être un aiguillon ; le temps presse.
(Image de la vignette et dans l’article dans le domaine public ; photographie d’une inondation aux États-Unis en 2008.)