Politique
Semaine de la mobilité : l’heure du péage urbain
22.09.2019

Cette congestion est principalement générée par les véhicules des navetteurs. Faut-il les inciter à abandonner leur auto à l’entrée de la ville ? L’Atelier de recherche et d’action urbaine (Arau) nous alerte : développer les parkings de dissuasion, cela coûte cher – sans compter qu’il faudra prolonger plusieurs lignes de bus pour les desservir –, cela consomme de l’espace urbain alors qu’il est rare et, surtout, cela encourage l’exode urbain qui, par effet boule de neige, débouche à son tour sur un usage renforcé de la voiture. Il vaudrait mieux, nous dit l’Arau, les faire payer via un péage urbain qui pourrait rapporter 325 millions par an. Mais là, d’autres protestent : ce serait – vieux couplet – de la « rage taxatoire » ou – plus moderne – de « l’écologie punitive ».
Ce refrain aux relents poujadistes est notamment entonné par un parti de gauche, qui nous rappelle que certains navetteurs ne le sont pas devenus par caprice, mais que c’était la seule façon de trouver à se loger à des prix accessibles. En effet, une partie des ménages qui quittent Bruxelles vont s’installer pour cette raison au sud à Tubize ou à Braine-le-Comte, au nord du côté de Vilvorde. Certains sont mal reliés à Bruxelles par le train – quoique Bruxelles soit la ville la mieux desservie de Belgique –, d’autres auraient besoin de leur voiture pour l’exercice de leur profession. Franchement, on n’est pas convaincu : l’économie bien réelle en logement est largement compensée par les frais liés à l’achat et à l’usage d’un véhicule devenu obligatoire pour le moindre déplacement. Si, en effet, un grand nombre de Wallon·ne·s ont absolument besoin d’un véhicule autonome pour un usage professionnel, ce n’est que rarement le cas pour ceux et celles qui travaillent à Bruxelles. Si certaines personnes estiment que « leur voiture, c’est leur liberté » (pour paraphraser un slogan en vogue il y a quelques décennies) et qu’elles se donnent le droit d’infliger aux Bruxellois·es les nuisances liées à la navette automobile, la Région, à son tour, a bien le droit de vouloir décourager ces comportements sans que ça lui coûte et de réserver ses efforts pour soutenir le maintien à Bruxelles des ménages à bas revenus – c’est même un chantier prioritaire – et de faire payer à ceux et celles qui utilisent la ville sans y habiter le prix des conséquences de leur choix nuisible pour la collectivité.
À Paris – et à Bruxelles ce ne doit pas être très différent –, chaque véhicule qui pénètre dans la ville transporte 1,1 occupant en moyenne. Il suffirait, nous dit-on, que ce chiffre monte à 1,7 pour supprimer complètement la congestion automobile. Des personnes n’ont pas d’autre moyen de rejoindre leur poste de travail qu’en voiture ? Admettons. Mais on ne voit pas pourquoi elles doivent absolument utiliser leur propre véhicule et être seules à l’intérieur. La Région développera une petite application disponible gratuitement sur Androïd et iOs permettant aux navetteurs qui ne peuvent atteindre Bruxelles qu’en voiture de s’interconnecter pour organiser leur déplacement par covoiturage. Pour leur mobilité interne à la Région, si les transports en commun ne leur conviennent pas, ils trouveront des trottinettes et des vélos électriques à tous les coins de rue. Un éventuel péage urbain en tiendra compte : il sera gratuit à partir de trois occupants et très modéré pour deux ; en revanche, il sera salé pour les automobilistes solitaires qui, sauf exonération justifiée (10 % du total ?), auront vraiment fait preuve d’une très mauvaise volonté. Et le tour sera joué.