Politique
Quels liens entre les jeunes et les partis politiques ?
17.12.2021
Quelle est la forme juridique de votre organisation et quels sont ses liens structurels avec le parti ?
Amélie Georges : Écolo j est une organisation de jeunesse (OJ) politique reconnue par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Légalement, Écolo j est une entité du parti Ecolo, ce qui ne lui enlève pas son indépendance. De manière formelle, le lien avec Ecolo est inscrit dans les statuts et le règlement d’ordre intérieur d’Écolo j. Ainsi, notre comité administratif, composé de personnes de moins de 30 ans, comporte obligatoirement un·e mandataire chargé·e des relations avec Ecolo. Cette personne représente Écolo j au bureau politique d’Ecolo et doit être membre du parti. Les autres membres du CA ne sont pas obligé·es d’être encarté·es. Par ailleurs, les coprésident·es d’Écolo j ne peuvent pas cumuler ce mandat avec une fonction à responsabilité ou à forte visibilité au sein d’Ecolo. Le parti offre un soutien administratif régulier à l’organisation de jeunesse mais il y a une distinction nette entre les travailleur·euses des deux organisations et les locaux sont séparés. Les liens financiers sont également un lien formel avec le parti : celui-ci réalise chaque année une donation qui représente 5,5 % des revenus d’Écolo j.
Maximilen Lerat : Le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) est une ASBL et une OJ reconnue. Nous sommes les représentants des jeunes de 16 à 35 ans du parti, autant pour les militants que les sympathisants. Le MJS ne reçoit aucun euro du parti. Il est indépendant financièrement. Les fédérations JS et sections JS peuvent recevoir des subsides, si elles le demandent, auprès de leurs fédérations PS et sections PS et que celles-ci acceptent.
Max Vancauwenberge : Comac est une ASBL et une OJ. Nous sommes le mouvement étudiant du parti et travaillons dans le cadre de la même orientation visant à un changement de système et pour le socialisme 2.0. Comac définit cependant lui-même ses campagnes et la direction de Comac est élue par les membres de Comac. Nous avons notre propre financement.
À quoi cela sert-il de créer une section jeunesse au sein des partis politiques ?
Amélie Georges : Écolo j a été créé en 2005. Le but était de donner plus de poids aux jeunes, à leurs besoins et leurs idées progressistes au sein du parti. Mais plusieurs choses sont à prendre en compte : Écolo j est avant tout une organisation de jeunesse (OJ) et non un parti. Comme les autres OJ, son but est de former des « cracs » : citoyen·nes responsables actif·ves critiques et solidaires. Le lien avec le parti, même s’il est important, n’est pas notre seule mission – Écolo j est là pour accueillir différents publics : ceux qui veulent militer dans le système, avec le système et en dehors du système. Cela signifie qu’une partie de nos membres sont effectivement là pour apprendre les codes du milieu et se créer un réseau dans le monde politique dans le but d’être embauché·e chez Ecolo. D’autres sont là pour comprendre ce milieu ou bien l’influencer sans vouloir rejoindre le parti. D’autres encore ne se trouvent pas à leur place en politique mais sont intéressé·es par les activités militantes et les thématiques abordées par Écolo j.
Maximilen Lerat : Le MJS existe depuis 1965. Il est important pour nous d’avoir des jeunes représentants partout à Bruxelles et en Wallonie. Les jeunes sont l’avenir, et il est important de continuer à les préserver, à renouveler le mouvement par de nouveaux jeunes étudiants, militants et élus. De leur faire confiance aussi. C’est pourquoi le MJS national est fier d’avoir 13 fédérations régionales et dans chacune de celles-ci plusieurs sections.
Max Vancauwenberge : Comac permet aux jeunes de se lancer dans la lutte pour changer le monde et de faire leurs propres et premières expériences de manière autonome. Cette autonomie est nécessaire pour laisser de la place aux idées nouvelles et à la créativité propre à la jeunesse. Comac possède également sa propre dynamique, par et pour les jeunes.
Pourquoi vous êtes-vous engagé·e dans une organisation de jeunesse politique et non pas syndicale ou associative ?
Amélie Georges : Je milite avec Écolo j depuis 2016, j’avais 19 ans. Je m’y suis intéressée d’abord grâce aux activités organisées (formation sur le genre, ciné débat sur l’autogestion etc.). J’ai décidé de m’y investir car les valeurs et le mode d’organisation me correspondaient. C’était une bouffée d’air frais de rencontrer d’autres jeunes de gauche, engagé·es dans différentes luttes. Et d’un autre côté, c’est tellement important pour moi de comprendre comment la politique fonctionne et d’avoir un droit de regard sur ce qui se passe. De mon point de vue c’est ça le petit « plus » apporté par le fait d’être une OJ politique par rapport à d’autres formes associatives. Mais ça ne nous empêche pas d’avoir des liens avec le monde associatif, les autres OJ et de collaborer.
Maximilen Lerat : Je m’y suis investi en 2006-2007 avec l’arrivée de Paul Magnette à Charleroi. Je m’intéressais déjà de loin à la politique et je me suis senti tout de suite proche des idées et des valeurs du Parti socialiste. Avec Paul Magnette, cela n’a fait que confirmer mes convictions, autant pour ma ville que pour le parti en lui-même. Avec le MJS, nous avons des contacts avec l’Action commune (FGTB, Solidaris, Pac, Faucons rouges1…) et de nombreux jeunes y sont affiliés voire même représentants. Nous pouvons d’ailleurs être dans plusieurs structures bénévolement. Nous avons également plusieurs associations dans nos fédérations. Par exemple à Charleroi avec le « Réveillon solidaire », une association pour aider les plus démunis.
Max Vancauwenberge : J’ai choisi de m’y engager pour son engagement sincère, sa présence sur le terrain, son ambition et sa volonté de changer de système. Beaucoup de membres sont également engagés dans d’autres organisations de jeunesse.
Les partis s’intéressent-ils vraiment encore aux jeunes, alors qu’ils et elles sont minoritaires et ne constituent pas un réservoir de voix très important ?
Amélie Georges : Je ne connais pas la situation pour tous les partis, mais pour Ecolo je trouve que oui, un intérêt est bien porté aux jeunes. Déjà au niveau des élu·es du parti, on retrouve de nombreuses personnes plutôt jeunes. Il y a également beaucoup d’interactions, que ce soit au niveau local ou par rapport à une thématique précise, entre les membres d’Ecolo et d’Écolo j. C’est un avantage pour Ecolo d’avoir l’avis des jeunes d’Écolo j sur différents sujets. Par ailleurs, les luttes menées par Ecolo correspondent à plusieurs revendications actuellement défendues par des jeunes, notamment en matière environnementale mais pas uniquement. Pour conclure, je dirais qu’il y a une réciprocité : les jeunes sont intéressés par Ecolo et Ecolo s’intéresse aux jeunes.
Maximilen Lerat : Le PS s’intéresse et est présent pour le MJS. Dans les statuts du PS, une représentation de jeunes de moins de 35 ans est demandée pour ses différentes structures. Nous avons plusieurs rencontres avec nos élus mais aussi le secrétaire général du parti pour échanger et donner notre avis. Il en est de même pour les fédérations et sections. Le parti s’intéresse aussi aux jeunes dans les universités, les hautes écoles, ainsi qu’aux jeunes citoyens de Wallonie et de Bruxelles. Le PS collabore beaucoup avec nous et est à notre écoute sur la vision qu’on peut leur apporter de la jeunesse. Nombreux sont les députés socialistes qui posent des questions dans les parlements pour nos jeunes et nos ministres socialistes sont sensibles à leurs situations.
Max Vancauwenberge : La lutte de classes est l’ADN du PTB. La loi de la rue est plus importante que la rue de la Loi. C’est lorsque les gens ont pris leur propre sort en main et se sont mobilisés que de véritables changements ont eu lieu. La jeunesse a toujours joué un grand rôle dans les grands mouvements de masse. Pensons à la révolution cubaine, la résistance antifasciste, la lutte contre le colonialisme, Mai 68, les Indignados en Espagne, Occupy Wall Street, le Printemps arabe, le mouvement antiraciste et Black Lives Matter, les grèves climatiques, les mobilisations féministes, etc. Sans la jeunesse, il n’y a pas de changement social.
Propos écrits recueillis par Camille Wernaers en novembre 2021.