Politique
Introduction
02.12.2009
Vint le 7 juin. Comme prévu, les socialistes s’effondrèrent presque partout dans la vieille Europe : Flandre, France, Pays-Bas, Allemagne, Italie, Grande-Bretagne, Autriche, Danemark, où s’était constitué un État social consistant qui devait tout au rôle de premier plan joué par les socialistes et les sociaux-démocrates. Seule la Wallonie résista. Divine surprise dans les Maisons du Peuple. Le recul socialiste fut tellement en deçà des prévisions catastrophistes qu’on parla d’un succès, presque d’une victoire. Le PS gardait la main partout. Circulez, il n’y aurait plus rien à voir ? Si, au contraire. Car ce sursaut inattendu de l’électorat socialiste interpelle toute la gauche. Pourquoi, malgré tout, l’électorat populaire wallon a-t-il confirmé sa confiance au Parti socialiste ? Qu’est-ce qui fonde cette exceptionnelle identification entre un peuple et un parti, qui semble résister à tous les cataclysmes ? Pourquoi aucune gauche protestataire ni aucune extrême droite n’arrive à faire son nid en Wallonie dans les plis de la crise économique et du chômage de masse ? Pourquoi les Verts, présentés souvent comme une nouvelle gauche éthique, n’arrivent-ils pas à mordre sur l’électorat socialiste alors qu’ils recrutent largement dans les autres viviers ? Pourquoi les pratiques d’usage abusif de positions dominantes, pourtant abondamment dénoncées, n’ont-elles pas eu d’effet dans le comportement électoral des Wallons, puisque celui-ci n’a pas fait de différence entre les lieux où le parti s’était visiblement rénové, comme à Charleroi, et les autres, comme à Liège ? En guise d’explication, on a évoqué le coup de génie de Di Rupo, déclarant solennellement à dix jours du scrutin qu’il ne formerait en aucun cas de majorité avec le MR. Grâce soit rendue au tandem Di Rupo-Reynders. Ils ont poussé jusqu’au bout la logique de l’affrontement politique et redonné des couleurs au clivage gauche-droite. Du coup, ce sont les deux autres partis, Écolo et le CDH, qui apparurent prisonniers de la politique traditionnelle en ménageant la chèvre et le chou, donnant l’impression de se préparer à convoler avec le plus offrant. Le succès moindre que prévu d’Écolo s’explique sans doute par le retrait d’électeurs progressistes tout disposés à sanctionner le PS, mais pas au prix d’une alliance avec le repoussoir Reynders. Autre explication possible : la consolidation d’un axe rouge entre le PS et les autres composantes de l’Action commune (la FGTB et les Mutualités socialistes) dont la profonde culture commune fut mobilisée au profit du parti au nom d’une opération de salut public qui interroge la notion d’indépendance syndicale. Mais fondamentalement, la question reste ouverte. Ce sursaut du PS est-il la promesse d’une reconquête de l’opinion publique ou simplement un répit dans un déclin historique inéluctable ? Le peuple wallon se transforme, socialement et culturellement. Mais il aura toujours besoin d’une gauche sociale et politique. Le Parti socialiste en est-il l’indépassable pivot ? Ce thème a été coordonné par Éric Buyssens, Jean-Paul Gailly, Henri Goldman et Olivier Jusniaux.