Présentation – Le Pouvoir des écrans

Plus le temps passe et plus l’évidence s’impose : les écrans prennent une place de plus en plus prépondérante dans nos vies, et pas seulement dans celles des plus jeunes. Avec la pandémie de covid-19, ce phénomène s’est accéléré, le mot « distanciel » est entré dans le langage usuel, le télétravail s’est massifié et beaucoup de travailleur·euses ne semblent plus vouloir s’en passer…

Cette « numérisation » de nos espaces sociaux a apporté un grand nombre d’avancées positives : un accès à la connaissance et aux échanges quasi-instantané, la facilitation de nombreuses tâches aliénantes, la possibilité pour de nombreuses personnes de rompre avec l’isolement social… Mais elle a aussi sa face sombre : un accès pour le moins inégalitaire aux biens et pratiques numériques, une empreinte écologique colossale et souvent ignorée, de nouvelles formes de domination ou de violence, une transformation des rapports humains qui les rend parfois plus faibles, plus vaporeux… plus distants.

Et comme souvent avec les évolutions technologiques, nous devons affronter les problèmes, techniques et éthiques, sur le tas et au milieu d’une grande inertie. Le pouvoir politique, en particulier, donne toujours l’impression, faute de vision à long terme et souvent d’une compréhension profonde du sujet, de courir après le train en marche ou de servir les intérêts des entreprises les plus puissantes. L’initiative, c’est d’abord celle du privé et des entreprises qui développent des produits dans une visée mercantile – pour le lucre comme on disait autrefois – ; c’est, ensuite, celle de quelques individus et groupes qui inventent, créent, détournent, souvent sans grands moyens, pour offrir des alternatives numériques, plus inclusives.

Ce dossier de Politique est né de ces constatations et d’une impression plus générale : le fonctionnement de ce « monde des écrans » reste très obscur au plus grand nombre, tant la relation aux écrans les fait paraître inoffensifs. Qu’est-ce que le numérique au fond ? Comment fonctionne le « dématérialisé », quels outils très physiques se cachent derrière un « cloud » ? Comment nos données sont-elles « monétisées » et quelle marge de liberté pouvons-nous conquérir ?