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Ni burqa ni photoshop

L’information vous a peut-être échappé, dans le flot des guirlandes de Noël : les Palestiniens ont encore été privés d’un droit élémentaire. Je cite la presse http://www.rue89.com/2009/12/24/le-concours-de-miss-palestine-torpille-par-le-hamas-131188 : « Un spectacle qui devait souder les liens entre les Palestiniens », « une des rares plages de respiration pour la jeunesse palestinienne », « la manifestation qui devait faire briller l’identité et la cause palestinienne au-delà des frontières de la Cisjordanie »… Essayez donc de deviner cet événement magique… ? — Une fraternisation entre le Fatah et le Hamas ? — L’envol d’une fusée emportant l’ensemble de l’armée israélienne sur la Lune ? — Non, bien plus important… — Une qualification pour la prochaine Coupe du Monde de foot ? — Non, vous manquez vraiment d’imagination ! Qu’est-ce qui peut bien consoler tout un peuple de son interminable malheur… ? Mais c’est bien sûr : l’élection d’une Miss nationale ! Une Miss qui aurait pu représenter son pays au concours de Miss Monde… et qui sait, l’emporter ! Vous imaginez l’avancée pour la cause palestinienne ? — Mais ce merveilleux moment n’a donc pu avoir lieu ? — Non ! Car, selon les mêmes journaux, l’élection a été « torpillée par le Hamas ». Admirez ce terme, « torpillé », avec son air de combat naval ou d’action terroriste… — Et au nom de prétextes ridicules, je suppose. — D’abord, les dirigeants du Hamas ont dénoncé une activité inspirée du mode de vie occidental… — Ce qui n’est pas faux… — Ensuite, la cérémonie devait se dérouler le 26 décembre, la veille du premier anniversaire de l’opération israélienne « Plomb Durci » contre Gaza… — Ben, là non plus, ils n’ont pas tort ! Imaginez l’élection d’une Miss Amérique le 11 septembre… les sectes évangélistes ne seraient pas les seules à s’en offusquer. — Troisième motif avancé par le Hamas, et sans doute le principal : ce type de manifestation serait un encouragement à la débauche… — À ce moment de l’histoire, nous devrions nous écrier en choeur : ah, voilà bien le Hamas… et au nom de la liberté, qui comprend aussi le droit à ce genre de « débauche », descendre dans la rue pour défendre les Miss ! Mais franchement, au risque de choquer, je ne suis pas sûre d’avoir envie de choisir entre la conception des femmes du Hamas et celle qui nous est présentée dans les concours de beauté. Il fut un temps où ces manifestations étaient dénoncées, non pas au nom d’une incitation à la « débauche », mais de l’image donnée des femmes ! En 1971, une féministe a réussi à se hisser en finale du concours Miss Belgique et devant les caméras de télévision, jeter son numéro en clamant « nous ne sommes pas du bétail ! » M. Denis et S. Van Rockeghem, Le féminisme est dans la rue, Editions Pol-His, 1992 — Et si je peux me permettre un souvenir personnel, puisqu’il y a prescription : une autre année, concurrentes et spectateurs ont dû quitter à la hâte le casino de Knokke pour cause d’alerte à la bombe… et je vous jure qu’à l’époque, le Hamas n’y était pour rien ! — Et aujourd’hui, on voit se développer des concours de Miss de plus en plus jeunes, sans que quiconque y trouve à redire… — Alors bien sûr, nous préférons sûrement toutes vivre ici, avec toutes nos conquêtes… Mais ne nous laissons pas piéger entre l’enfermement et cette pseudo liberté, entre la burqa et les corps redessinés par photoshop !