Malgré le net glissement à droite du Parlement européen (et de la future Commission), Ursula Von Der Leyen dit vouloir maintenir un certain engagement sur le social, avec le Socle européen des droits sociaux. Se targuant de « progrès historiques en ce qui concerne notre socle des droits sociaux, qu’il s’agisse du salaire minimal ou de la toute première garantie pour l’enfance », elle a affirmé son souhait de « garantir aux travailleurs salariés comme aux indépendants une transition professionnelle équitable et de bonnes conditions de travail », soulignant à cette fin l’importance « cruciale » du dialogue social. Elle a également annoncé la création inédite d’un portefeuille de Commissaire au logement, souhaitant répondre à l’une des préoccupations principales des Européen·nes. Il s’agira bien sûr de lui rappeler ces mots et engagements lorsque chanteront à nouveau les sirènes de l’austérité.

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Ce n’est pas le climat politique européen qui consolera les Belges de gauche de la grisaille. Malgré quelques victoires locales des forces de gauche, l’électorat européen penche clairement vers la droite. Les conservateurs du PPE sortent renforcés dans leur position dominante, tandis que l’extrême droite passe d’un cinquième à près d’un quart des sièges au Parlement européen. Ce n’est pas la grande vague brune qu’on pouvait craindre, mais si les deux groupes d’extrême droite (CRE et ID) parviennent à s’unir (ce qui n’est pas garanti), ils deviendront la troisième force, tirant vers eux les droites traditionnelles. Alors que l’alliance des socialistes (S&D) ne perd que 3 sièges, les Verts européens s’effondrent comme un glacier, perdant 20 sièges d’un coup. Le baromètre est stable, en revanche, pour les gauches radicales.

Qu’attendre de cette recomposition du paysage politique européen ? Malgré la perte d’une vingtaine de sièges par le groupe libéral Renew, la grande coalition pro-européenne qu’il formait avec le PPE et les S&D devrait se maintenir, avec une majorité plus fragile. On peut espérer voir le Pacte vert tenir le coup, mais le recul des Verts rendra plus difficiles les avancées socialistes sur les politiques sociales et la transition juste. L’objectif sera surtout défensif : il s’agira de conserver les acquis comme la capacité d’investissement des États et le Socle européen des droits sociaux.

Par ailleurs, l’union ponctuelle des droites modérées et radicales pourrait devenir plus fréquente, entravant les projets législatifs les plus progressistes en matière sociale, d’environnement ou d’égalité de genre. Le rôle pivot des libéraux, dans ce cas, les placera face à une grande responsabilité. Il est également probable que la Présidente de la Commission (sans doute à nouveau Ursula von der Leyen) continue de coopter une partie du programme de l’extrême droite en matière d’immigration, dans l’espoir d’éroder sa base électorale, en dépit de l’inefficacité patente de cette stratégie. La mise en œuvre du Nouveau Pacte pour l’Asile et la Migration mettrait alors l’accent sur ses aspects restrictifs et répressifs.

Sur les questions de sécurité et de défense – domaines où le Conseil fixe les grandes orientations – la nouvelle composition du Parlement n’augure pas d’inflexions majeures. Sur le plan du commerce extérieur, le recul de la gauche renforcera la probabilité de traités de libre échange fondés sur l’abaissement généralisé des normes sociales et environnementales. L’aide au développement, enfin, pourrait aussi pâtir de cette recomposition et se voir de plus en plus mise au service de politiques migratoires restrictives.