Politique
Le 26 mai, fais ce qu’il faut. Pose ta pierre pour construire tout autre chose.
02.04.2019
Ce billet n’a pas la prétention de donner de leçons de prêt-à-penser à qui que ce soit, ni celle d’énoncer une « ligne juste », mais plutôt de partager brièvement les réflexions pré-électorales de l’électeur bruxellois que je suis.
Cinq années d’hégémonie populiste
Nous sortons, un peu groggy, de cinq années de montée des fascismes et de l’autoritarisme en Europe. Des majorités politiques qui ne portent de « libéral » ou de « moderne » que le nom, ont pactisé avec un conservatisme borné, xénophobe, et préfasciste. Elles ont pilonné systématiquement tout ce qui pourrait exercer un contre-pouvoir face aux décideurs politiques. Elles ont encouragé la division et le rejet de la solidarité. Elles ont eu comme ligne constante le démantèlement des conquêtes sociales et des services publics, et/ou le refus de toute nouvelle avancée.
Toutefois des poches de résistances ont existé dans certains pays, certaines régions ou villes. Des mouvements sociaux montent partout pour les libertés, les droits sociaux, l’égalité, et un autre avenir pour la planète. Le moment démocratique est donc venu de se prononcer pour bâtir un autre avenir, en Europe, en Belgique, à Bruxelles. Sans conférer au geste électoral plus qu’il ne faut : il reste incomplet s’il ne s’accompagne pas d’autres gestes militants par ailleurs.
Puisqu’il s’agit de vote, il me paraît essentiel de prendre en considération qu’au plan fédéral et régional, nous sommes dans un scrutin proportionnel et pas majoritaire. Les discours flamboyants, s’inspirant de la rhétorique politique en usage jusqu’il y a peu, chez nos voisins français ne sont donc pas pertinents. Considérons aussi les mouvements sociaux de tout type et les aspirations des citoyens quant aux formes concrètes de la démocratie en dehors des scrutins, dont le débat sur les cumuls de mandats n’est qu’une illustration parmi d’autres.
Scruter les actes
Au plan Européen les fascismes s’organisent et se structurent. Par contre les familles politiques « traditionnelles » européennes sont des conglomérats plutôt que de vraies fédérations. On connaît les atermoiements au sein du PPE à propos de leur membre fascisant Hongrois. Mais il faut souligner aussi le gouffre qui sépare les idées du leader des socialistes européens d’un programme de gauche.
Les tensions entre populistes-fascistes et démocrates, puis entre partisans du libéralisme aveugle et ceux d’un modèle social et écologique, ont sous-tendu tous les débats et toutes les décisions. Et il faut bien reconnaître que le bilan n’est pas positif…Il y a çà et là toutefois des victoires le plus souvent portées par des élus verts, avec le plus souvent l’appui d’élus socialistes.
Il y a eu un moment symbolique fort au cours de la législature européenne, celui où « l’étoile polaire de la gauche », l’égalité, a été réaffirmée face à l’arrogance et au mépris des puissants. C’est celui de l’interpellation frontale d’Emmanuel Macron par Philippe Lamberts, « l’homme le plus détesté de la City ».
En Belgique, le MR a rompu définitivement avec le libéralisme belge historique et s’est vautré dans le libéral-nationalisme (ou le national-libéralisme c’est comme on veut), confiant la Défense au digne fils d’un collaborateur, l’Intérieur à l’ex-fondateur d’une section du Vlaams Blok, et l’Asile à un leader xénophobe.
La ligne politique sociale et économique du gouvernement fédéral sortant aura été jusqu’au bout de servir les intérêts des groupes financiers et des patrons. Mais en fait plus les intérêts des financiers que ceux des entrepreneurs, comme le soulignait un leader syndical. J’observe avec inquiétude et perplexité l’évolution éclatée des relations au sein de la gauche politique et syndicale flamande, et la ligne politique illisible du leadership actuel du SPa . Son président semble avoir, c’est le cas de le dire, perdu le Nord.
A Bruxelles, le bilan est en demi-teinte. Il en reste une alliance stable pour refuser les discriminations quelles qu’elles soient, un souci de prise en compte des inégalités sociales. Il y a aussi l’émergence progressive d’un autre modèle de ville, tournant le dos au tout-à-la-voiture. Il y a eu aussi une tentative d’améliorer la gouvernance, avec des succès divers.
Il reste toutefois un goût de trop peu, de trop lent : ainsi Bruxelles peine à avancer dans une autre gouvernance du service public et à donner à celui-ci les moyens concrets dont il a besoin, se bornant à veiller à la paix sociale avec les syndicats dans ce secteur.
Changer ou simplement gérer, il faut choisir
Les partis démocratiques du centre (CDH, DEFI) ne sont pas, à mon sens, porteurs de réelles avancées progressistes sur le plan écologique et social. Ils sont enracinés dans leurs histoires respectives, religieuse d’une part, communautaire de l’autre. Ils restent toutefois des interlocuteurs de qualité dans le débat démocratique et dans la gestion des institutions publiques.
La liste « one brussels » ressemble plus à un club sympathique d’experts urbains en tous genres qu’à une liste de gauche. Je ne m’y attarderai donc pas.
Que dire du PTB ? Il relaie incontestablement les révoltes d’une part non négligeable de la population, particulièrement les laissés-pour-compte de notre société. Mais va-t-il plus loin que ce rôle de porte-voix ? A la notable exception près de son député fédéral Marco Van Hees, il faut bien constater que non. Est-il à même de formuler des alternatives concrètes et de faire porter celles-ci par l’ensemble de la gauche ? Le constat ici aussi est négatif.La législature bruxelloise se clôture de plus par une absence navrante de poids et de capacité d’interpellation des (quatre !) élus PTB. Etre député ce n’est pas être un permanent de parti payé par les électeurs, si je puis me permettre cette caricature pour mieux me faire comprendre.
Me voilà devant le choix à faire entre les deux formations politiques a priori porteuses de changement et capables de formuler des alternatives : les socialistes et les écologistes. Au regard des valeurs de la gauche, l’internationalisme, la solidarité au-delà de quelque frontière que ce soit, est un critère essentiel. Ceux qui auraient dû, de par leur histoire, l’incarner les premiers, sont les socialistes. Force m’est de constater qu’ils en sont loin en Belgique, malgré les tentatives diverses de rapprochement, dont je fus.
Par contre, les verts l’incarnent de manière forte, en formant au parlement fédéral un groupe politique unique, qui pourrait devenir en mai le plus important et mettre en échec le poids actuel de la NVA. Au regard de mon « étoile polaire » citée plus haut, les socialistes et les verts belges sont globalement clairement ancrés à gauche dans leurs actions politiques concrètes. Observons aussi l’excellente collaboration rapidement instaurée dans les majorités rouges-vertes bruxelloises. Même si certaines mesures peu sociales du dernier gouvernement fédéral à participation socialiste, d’une part, et certaines idées vertes sur l’allocation universelle, d’autre part, sont loin de m’emballer.
Venons-en alors au changement plus profond que nous sommes nombreux à souhaiter, tant dans les politiques menées que dans la gouvernance publique. Je suis peu suspect d’anti-socialisme primaire, c’est peu dire au regard de mon implication passée dans « Réflexion et Action Socialiste » et « DUNES ». Mais il me faut bien constater qu’ici et maintenant la force politique de gauche la mieux garante de ce changement est celle de l’écologie politique. Et je ne suis pas le seul à le penser, si j’en crois Henri Goldman.
On l’aura compris, mon choix personnel n’est pas signe ni d’une adhésion politicienne à un appareil de parti, ni d’une impulsion émotionnelle climatique.
Je veux simplement poser ma pierre pour les fondations d’un édifice réellement nouveau et ouvert.
Ma seule recommandation aux lecteurs de ce billet sera : votez, et votez à gauche, pour des candidat(e)s député(e)s, capables d’agir en profondeur concrètement et en profondeur.