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La Grèce, pour l’exemple !

L’histoire nous dira un jour pourquoi les pays membres de l’Union européenne se sont acharnés à conserver la Grèce dans la zone Euro, contre toute logique économique, monétaire et financière. Les arguments ne manquent pas mais ils sont fragiles avec en première ligne le spectre de « la fin de l’euro » voire de l’Europe, les deux étant souvent liés – à tort – dans l’argumentation ! L’Union européenne témoigne avec brio d’un processus de fédéralisation à plusieurs niveaux et à plusieurs vitesses permettant des ajustements continus, des pas en avant et des pas en arrière, offrant aux plus audacieux l’opportunité d’avancer seuls et aux plus timides de rester en arrière, sans être exclu. L’histoire de la construction européenne est moins l’histoire de ses principaux traités (signés) que ce processus collectif d’intégration fait d’avancées, d’immobilisme, et de reculs, de partenariats temporaires, et d’alliances variables au rythme des intérêts nationaux, des relations bilatérales, et des multiples élections et coalitions nationales. La zone Euro n’est donc ni la charpente de l’Union européenne ni le symbole de cette dernière et on peut en sortir ou refuser d’y entrer comme dans bien d’autres domaines, et non des moindres à l’instar de l’espace Schengen ou de l’Otan. En effet, le partage d’une même monnaie n’est ni plus ni moins important que la mobilité des citoyens européens dans l’Union européenne ou l’appartenance à une structure supra-européenne de défense commune. Utiliser ou non les mêmes billets vaut bien la levée (ou non) des contrôles aux frontières où l’obligation de rentrer en guerre si un membre de l’Otan est attaqué. Non seulement la sortie de la Grèce de la zone Euro ne menace en rien cette dernière mais, surtout, la zone Euro ne conditionne pas l’avenir de l’Union européenne. Celle-ci est beaucoup plus qu’une monnaie unique et il est facile de le démontrer. Mais alors, pourquoi les pays membres de l’Union européenne se sont acharnés à conserver la Grèce dans la zone Euro, contre toute logique économique, monétaire et financière. Par solidarité et par amour pour la Grèce, berceau de la civilisation occidentale ? Les stéréotypes les plus grossiers sur les Grecs paresseux qui fraudent l’État semblent indiquer le contraire, car, après tout, comme on l’entend trop souvent, « pendant que les Allemands travaillaient dur et faisaient des économies, les Grecs dansaient le Sirtaki ». La réponse à cette question est sans doute contrastée et complexe mais une piste peut être avancée en essayant de faire un lien entre la dégradation des conditions de vie en Grèce, images à l’appui, et en parallèle les mesures d’austérité imposées au niveau national partout en Europe. Car dans l’imaginaire collectif, et sans doute dans l’esprit des communicants, ces deux processus s’alimentent mutuellement au sens où les mesures d’austérité sont censées faire barrage au risque d’effondrement que connait la Grèce. Partant, chaque reportage ou témoignage sur la grande souffrance du peuple grec devient une preuve supplémentaire non seulement de la nécessité de l’austérité, mais surtout de l’horreur qui guette le pays qui s’écarterait du droit chemin. Vu de cette manière, le spectacle de la Grèce coûterait cher à l’Union européenne mais ce serait le prix à payer pour imposer aux peuples en quelques années ce qui ne serait jamais passé, même pas en 20 ans, sans les images terrifiantes d’une nation à l’agonie, déchirée entre des néo-nazis, des procès pour corruption, le chômage de masse, la violence et au final une chute vertigineuse du niveau de vie.