Politique
Le « rêve général »
20.04.2006
Les deux événements n’ont apparemment aucun rapport et leur rapprochement pourra étonner et même peut être choquer certains. Et pourtant d’une certaine manière ils nous disent quelque chose de très semblable. L’immense mobilisation qui pendant des semaines à fait descendre des centaines de milliers de jeunes français dans les rues pour refuser la précarité sociale et le combat de toute une jeunesse d’ici qui réagit à l’assassinat de Joe pour exiger la «sécurité, le dialogue et la justice» nous parlent avec la même intensité et démentent avec force les clichés que, peu ou prou, nous véhiculons tous sur les nouvelles générations. Non elles ne sont pas indifférentes ou repliées sur elles-mêmes, elles ne sont ni cyniques ni blasées. Elles n’acceptent pas ce monde de violence, de rapports de forces exprimé dans la banalité d’un contrat d’emploi ou poussé dans l’horreur de l’extrême jusqu’à la mort. À propos de la tragédie de la gare centrale, on l’a dit, et on peut le constater à tout moment dans les pétitions ou les messages qui circulent dans la rue ou sur internet: l’émotion est aussi forte que maîtrisée. Les trois revendications des amis de Joe sont inséparables : «sécurité, dialogue et justice» et le monde des adultes et des responsables de tous niveaux doit les entendre et y répondre globalement. Le texte de la pétition est limpide. Simplement il dit ainsi ses objectifs qui sont autant d’exigences vitales: «Une plus grande sécurité dans les endroits publics ainsi que dans les transports en commun. Pourquoi pas des éducateurs? Rétablir un dialogue avec les jeunes délinquants, restants en marge de notre société. Luttons pour une société meilleure pour TOUS !». En trois phrases, et une formidable leçon de maturité et de civisme tout est dit. La solidarité s’exprime dans une détermination et une vigilance citoyenne. Au cours des dernières semaines, dans les rues de France les jeunes avaient détourné le slogan de «grève générale» pour revendiquer le «rêve général». Ici et maintenant à partir d’un cauchemar les jeunes exigent de nous un autre rêve mais que nous avons l’obligation de transformer en réalité, celui d’une société plus solidaire.