Politique
Charité et solidarité
13.01.2005
Alors que l’on s’apprête à vivre chez nous un grand moment de fiançailles catodico-caritatives et de show humanitaire, des questions de plus en plus pressantes se posent sur la manière de contribuer au mieux à la solidarité avec les peuples victimes de la catastrophe du 26 décembre. En France, la polémique fait rage : une organisation comme MSF estime qu’elle n’a pas les capacités opérationnelles d’utiliser plus d’argent qu’elle n’en a reçu jusqu’ici. On parle de surenchère d’initiatives, d’embouteillage et de déperdition de l’aide. «Pharmaciens sans frontière» note de son côté qu’«une aide humanitaire aussi massive qu’irrationnelle pourrait déstabiliser à long terme l’économie des pays sinistrés et les rendre durablement tributaires de cette aide». La meilleure aide est celle qui à terme permet à l’économie des pays touchés de fonctionner. Il ne s’agit évidemment pas d’aider moins mais d’aider mieux, de planifier, de réguler, de penser, et osons le terme, de penser politiquement la solidarité. À ce propos le Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde faisait hier ce constat terrible: «L’aide internationale promise est estimée de 6 à 8 milliards de dollars. C’est six fois moins que ce que les onze pays détruits par les tsunamis remboursent chaque année». C’est effrayant, consternant, révoltant! Eric Toussaint, président de ce comité, ajoutait que «derrière la générosité médiatisée à outrance, même quand elle est sincère, demeure donc un mécanisme très subtil qui aspire les richesses des populations du Sud vers leurs riches créanciers». Les dons finiraient ainsi, de fait, par rembourser la dette. Des créanciers (pays ou organismes internationaux) acceptent le moratoire de la dette de certains pays. Insuffisant ou inutile. Seule l’annulation totale de la dette des pays touchés et des autres, ensuite, pour éviter des catastrophes plus discrètes peut être à la mesure de la solidarité nécessaire. Mais l’entendra-t-on vraiment dans le flot de paroles et d’images nées de l’union sacré des radiotélévisions privées et publiques? Et qui, au-delà des belles paroles, en assumera la responsabilité politique?