Politique
De quoi « Shame » est-il le nom ?
11.03.2011
Contrairement à ceux qui assimilent à des rebelles Le Soir, 5 et 6 février 2011 les manifestants bruxellois (en majorité), wallons et flamands (en minorité) rassemblés pour clamer leur honte, cette manifestation ne serait-elle pas plutôt celle de sujets façonnés par la société oligarchique en devenir ? Peu importe le contenu de l’accord, il faut que les politiciens tranchent à notre place. N’est-ce pas pour cela que nous les avons élus ? Honte donc à ceux qui ne font pas leur travail qui consiste à décider en dehors de nous ! En démocratie, il est légitime de critiquer un parti qui renie ses principes et ses engagements pour bénéficier des avantages de la participation gouvernementale. C’est précisément lorsqu’ils refusent des compromis à n’importe quel prix que les partis respectent le pacte démocratique. Dans un espace public livré par contre à l’oligarchie, c’est aux oligarques de trancher ces questions sans céder à la pression politique. Comme la politisation consiste dans la participation à la vie commune, gouverner dans un système oligarchique consiste précisément à libérer les forces économiques du contrôle politique. La relation entre Shame et les médias a été d’emblée fusionnelle. La presse écrite comme radiotélévisée ont célébré les jeunes manifestants et leur ont servi de caisse de résonance. Leur attitude a cependant été tout autre face au rejet de l’accord interprofessionnel Voir par ailleurs dans ce numéro… Les directions syndicales n’avaient-elles pas conclu un accord après avoir fait les concessions nécessaires aux exigences des patrons, donnant ainsi une leçon aux politiques ? Les délégués représentant les affiliés qui se sont permis de réduire à néant ce « premier accord ambitieux signé depuis que la Belgique est en crise (…) comme une pauvre note de conciliateur » ont été jugés sévèrement Le Soir,op. cit.. L’attitude de la FGTB et de la CGSLB qui ont rejeté l’accord, est donc blâmable puisque, comme l’écrit l’éditorialiste du Soir, le document avait été jugé acceptable par leurs dirigeants. La manifestation citoyenne ne serait-elle pas celle qui conteste qu’un cercle restreint élabore en dehors du contrôle des citoyens les décisions et non celle qui les fustige parce qu’ils ne paraissent pas suffisamment zélés pour le faire ? Encore heureux que les syndicats ont une organisation permettant à leurs militants de refuser un accord (AIP) conclu, selon eux, contre leurs intérêts, pour nous rappeler que l’oligarchie n’a pas encore réglé son compte à la démocratie. En droit en effet, c’est toujours aux gouvernés que revient le pouvoir. Si bien que ne pas conclure un accord à tout prix peut être aussi un bon moyen de sauver la démocratie.