Politique
De la cacophonie à la maturité
27.09.2021
Cet article a paru dans le n°117 de Politique (septembre 2021).
Le vendredi 20 août a eu lieu un nouveau comité de concertation (Codeco). Avant même qu’il démarre, le ministre-président bruxellois et le ministre fédéral de la Santé avaient prévenu que les éventuels assouplissements ne seraient pas d’application à Bruxelles, vu le faible taux de vaccination dans la capitale. Dans le même temps, la ministre de l’Enseignement supérieur (Communauté française) indiquait que la rentrée se ferait en code vert, à savoir en présentiel, sans restriction de places dans les salles de cours, mais avec un masque. Cette décision concerne les établissements bruxellois également. À l’heure de cette annonce, il était prévu que le supérieur néerlandophone à Bruxelles applique encore des restrictions, mais il semble désormais acquis qu’il basculera lui aussi en code vert.
On viendra encore dire que le fédéralisme « à la belge » est complexe et peu lisible. En réalité, ce qui est compliqué dans ce cas tient à deux éléments. Tout d’abord, il est difficile de mettre tout le monde d’accord et des compromis qui peuvent paraître alambiqués sont souvent nécessaires, certainement dans une configuration interfédérale (toutes les entités fédérées et le fédéral). Ensuite, il est quasiment impossible pour un·e responsable politique de se taire sur ce genre d’enjeu. Cela serait trop facilement interprété comme l’absence de message à passer. Faire une déclaration, intervenir dans la presse en amont d’une réunion, permet en quelque sorte de forcer la décision en prenant le grand public à témoin. Que la communication faisant suite au Codeco ne soit pas limpide relève d’un autre problème qui ne sera pas examiné ici, mais qui gagnerait à être pris en charge si on envisage de renforcer son rôle.
Avant la crise, la notoriété du comité de concertation était probablement limitée aux seuls politologues et constitutionnalistes. Depuis octobre 2020, c’est le centre de décision par excellence et son organisation rythme la vie politique et médiatique, au point qu’on en oublierait presque que les accords impliquant une coordination entre niveaux de pouvoir se prenaient à d’autres endroits, par d’autres acteurs (les président·es de parti) et, le plus souvent, sans conférence de presse.
Aujourd’hui, le président de l’Open VLD veut lui accorder un rôle prépondérant dans la coordination interfédérale. Dans cette optique, le comité de concertation deviendrait le lieu où se règleraient les différends entre les entités fédérées ou plutôt l’endroit où le fédéral finirait par trancher les désaccords des entités fédérées.
Il n’y paraît sans doute pas, mais cela constituerait un changement conséquent, sans doute une étape essentielle vers un fédéralisme plus mature et, surtout, un arrêt dans le glissement vers le confédéralisme. En faisant du fédéral l’arbitre des différends avec les entités fédérées, on consacre la prépondérance de la fédération et on met fin à l’idée que la Belgique ne serait plus qu’une coupole réunissant ponctuellement la Flandre, la Wallonie et la Fédération Wallonie-Bruxelles, et plus rarement Bruxelles et l’Ostbelgien. Cerise sur le gâteau pour les libéraux flamands, cette réforme renforcerait le poids de leur Premier ministre, même si on ne peut négliger celui des président·es de partis.
(Image de la vignette et dans l’article sous CC-BY-NC-ND 2.0 ; photographie d’un vaccin contre la polio, prise en 2012 par Aiko Kawamura pour Sanofi Pasteur.)