Politique
Constitution européenne : l’Europe dans le crachin
24.10.2005
Parce que les «non» français et néerlandais à la «Constitution européenne» ont interrogé fondamentalement le projet européen, il faut revenir sur les motifs de ces rejets. Afin de bâtir une nouvelle vision pour l’Europe et ses populations, où le débat et la participation citoyenne doivent jouer les premiers rôles.
Inès Trépant est l’auteure de « Pour une Europe citoyenne et solidaire: l’Europe des traités dans la vie quotidienne ». (De Boeck, 2002) « Les défaites de la vie conduisent aux plus grandes victoires » Max-Paul Fouchet En rejetant en mai et juin dernier le projet de constitution européenne, les Français et les Néerlandais ont bouleversé la trajectoire du processus de construction européenne et plongé l’Europe dans une profonde crise d’identité. L’onde de choc qu’ils ont suscitée par leur refus est d’autant plus brutale que le «non» émane de deux pays fondateurs phares de la construction européenne. Crise salutaire ou dévastatrice ? Tout dépend des leçons qu’on en tire. Dépasser l’émotion et ouvrir le débat Ce n’est que si l’on analyse avec soin les motifs du rejet du traité établissant une constitution pour l’Europe, que l’on évitera que la crise ne se transforme en cataclysme… À l’issue de campagnes référendaires fécondes et passionnelles, l’on peut noter combien la tâche est ardue, tant l’émotivité est forte. Les jours qui ont suivi la proclamation des résultats des urnes ont ainsi été ponctués par quelques passes d’armes entre les partisans du «oui» et les partisans du «non». Ces derniers étant accusés d’être les fossoyeurs de la construction européenne, et d’avoir usé d’arguments fallacieux ou opportunistes pour faire triompher le «non», en sacrifiant ainsi l’intérêt national et européen. Si ces échauffourées verbales ont pu s’expliquer sous l’emprise de la colère, de l’amertume ou de la déception, l’on peut toutefois les regretter car elles sont éminemment stériles. D’abord, parce qu’elles accentuent ce divorce culturel entre la population et ses élites politiques. Ensuite, parce qu’il est essentiel de prendre du recul pour éviter les fausses pistes vers lesquelles une interprétation erronée des résultats du vote risquerait de nous conduire. Lectures plurielles de la victoire du «non» Exercice difficile que de démêler l’écheveau des raisons qui ont poussé les électeurs à voter tantôt «oui» tantôt «non» au projet de constitution européenne, tellement elles s’enchevêtrent et se contredisent. Chacun y allant, de surcroît, de son «prisme déformant» en fonction du parti pris sur la question. Pour les uns, les référendums en France et aux Pays-Bas étaient déconnectés de la question posée, et ils ont simplement servi de défouloir à toutes les rancœurs pour la population. Pour les autres, ils ont rendu à la démocratie toutes ses lettres de noblesse, et ont constitué une occasion historique de débattre sur les finalités de la construction européenne. Expression, pour les uns, d’un repli identitaire ou nationaliste frileux, d’une sanction sans appel face à leur gouvernement respectif, d’une attitude anti-européenne, voire xénophobe à l’égard des «plombiers polonais», les résultats référendaires sont, pour les autres, l’expression d’un cri de révolte ou de souffrance, dont les racines dépassent le cadre national. Ils sont interprétés comme le miroir de la fracture sociale et culturelle en Europe ; une poussée démocratique où les gens sanctionnent «l’Europe telle qu’elle est». Trop interventionniste pour une partie de la population néerlandaise, les Français l’estiment le plus souvent trop libérale. À leurs yeux, l’Europe économique se construit contre les travailleurs : les remèdes proposés pour «relancer la croissance» sont avant tout axés sur le primat de la concurrence, une plus grande ouverture des marchés ou encore, du «devoir» des travailleurs d’être flexibles pour s’adapter aux défis de la mondialisation (cfr. les dernières grandes orientations de politiques économiques (GOPE) proposées par la Commission européenne et le Parlement européen ou le projet de directive européenne sur le temps de travail). Fer de lance de la libéralisation des échanges dans l’UE et dans l’enceinte de l’OMC, la Commission européenne s’est mise à dos une frange de la population qui nourrit, à son égard, méfiance voire hostilité. À titre d’exemple, nous retiendrons la très controversée proposition de directive sur la libéralisation des services – dite «directive Bolkestein» -, ou encore la position de la Commission sur la libéralisation des services dans le cadre de l’AGCS, qui ont déchaîné l’ire de nombreux citoyens. Dans un autre registre, il faut épingler le sentiment de trahison ressenti par les citoyens par rapport aux promesses non tenues : le fait que l’on ait promis l’approfondissement de l’Union avant son élargissement, alors qu’on a eu l’inverse, sans tenir compte de la «capacité de digestion» des citoyens, pour qui l’élargissement de l’Union à dix États membres en 2004 a été perçu comme précipité, déstabilisateur pour leur modèle social et l’émergence d’une identité européenne toujours en gestation ; la sensation d’avoir été grugé au sujet de l’édification d’une Europe sociale, promise pour faire passer la pilule des traités de Maastricht et d’Amsterdam, trop axés sur la construction économique de l’Europe… De ce point de vue, le «non» français ou néerlandais dépasse le vote sanction des mesures impopulaires prises à l’échelon national, car le cadre général des recettes socio-économiques qu’ils appliquent est bel et bien le reflet de ce qui est préconisé à l’échelle européenne. De façon plus globale encore, le «non» doit pouvoir être interprété comme une réaction hostile aux effets pervers du phénomène de la mondialisation, dans ses dimensions culturelles, sociales et économiques. Du «oui de combat» au «non de gauche» Dès le départ, la nature intrinsèque du projet constitutionnel a suscité les plus vives confusions et controverses, face auxquelles les partisans du «oui de gauche» se sont trouvés démunis. Censé être une loi fondamentale qui détermine la forme d’un gouvernement d’un pays, le projet de Constitution européenne trahissait d’emblée l’esprit d’une constitution : il regroupait, dans un texte ficelé, des éléments novateurs de nature constitutionnelle (à savoir les parties I et II du traité constitutionnel, traitant des valeurs, des objectifs, de l’organisation des compétences de l’Union et de la Charte des droits fondamentaux), tout en reprenant l’essentiel des dispositions des traités antérieurs (notamment Maastricht et Amsterdam) dans la partie III du traité (qui regroupe l’ensemble des «politiques de l’Union»), dont les manquements avaient pourtant été dénoncés à cor et à cri par la société civile dans son ensemble, en particulier en matière de protection des droits sociaux, environnementaux et de santé publique. En conséquence, les partisans du «oui» n’ont pu convaincre que le projet constitutionnel remettrait l’édification d’une Europe sociale sur les rails. Au contraire, en procédant dans la partie III dans une large mesure à un simple «copié/collé» des traités existants, et en lui conférant de surcroît un caractère quasi immuable (il faudra toujours l’unanimité des 25 États pour la modifier), la constitution était perçue comme plébiscitant un modèle économique qui avait pourtant montré ses limites. Les fondements économiques de ces traités reposant, en effet, sur le postulat de la théorie économique classique selon lequel il faut avoir foi dans les vertus régulatrices du marché, qui contribue à une amélioration automatique du bien-être général. En d’autres termes, la constitution apparaissait, sur le plan socio-économique, comme une confiscation du droit légitime du citoyen de faire émerger, à l’issue des urnes, un modèle de société alternatif à celui qui nous est concocté dans la constitution, à savoir : l’ossature de l’Europe libérale. Dans la même logique, les partisans du «oui» n’ont, par exemple, pas pu convaincre l’opinion publique que la constitution comblait sensiblement les carences démocratiques de l’Union, en renforçant entre autres substantiellement le rôle du Parlement européen dans de nombreux domaines. Enfin, les partisans du «oui de gauche» ont été confrontés à deux difficultés supplémentaires de taille pour faire valoir leur point de vue. Tout d’abord, le fait que la partie III du traité n’ait jamais été discutée par les conventionnels durant leur 16 mois de travail, a conforté bon nombre d’électeurs des limites de la démocratie européenne… Ensuite, la juxtaposition de la partie III à la partie I et II a multiplié les incohérences du texte, face auxquelles les partisans du «oui» ont été désarmés. Par exemple, comment convaincre les électeurs que l’objectif poursuivi par l’UE serait désormais celui d’une «économie sociale de marché hautement compétitive» et de «plein emploi» alors que la partie III affichait, pour sa part, plus modestement l’objectif d’un «niveau élevé d’emploi» ainsi que celui «d’une économie libre de marché, où la concurrence est libre et non faussée» ? Ou encore, comment convaincre les électeurs que le nouveau traité constitutionnel apportait de nouvelles bases juridiques solides pour relancer l’emploi alors que la partie III reprenait en grande partie l’organisation des politiques économiques telles qu’elles étaient conçues dans le traité de Maastricht ou d’Amsterdam, centrées principalement sur l’Union économique et monétaire, et le respect strict des critères de convergence ? Dans un autre registre, comment les persuader que l’UE s’attacherait à poser des garde-fous à la mondialisation sur la scène économique mondiale, lorsque la Commission axe l’essentiel de ses discours sur les bienfaits de la compétitivité et de la concurrence, en préconisant par exemple, la libéralisation de pans entiers de l’économie dans le cadre de l’OMC ? De même, comment rassurer les citoyens quant au respect des obligations étatiques en matière de services universels, lorsque la Commission défend parallèlement sans relâche une stratégie de réduction des aides d’État, trop souvent soupçonnées de fausser la concurrence ? Autant d’exemples contrariants qui handicapaient, dès le départ, le combat du «oui de gauche». Par ailleurs, l’idée défendue par le «oui de gauche» selon laquelle il fallait plutôt concentrer son énergie pour vaincre la droite au cours des prochains scrutins nationaux et européens, a le plus souvent été perçue comme un message de résignation, une acceptation des lois du marché comme phénomène inéluctable, en dépit du cortège de dégâts collatéraux qu’elles occasionnent pour le corps social dans son ensemble. Les fausses bonnes solutions « Il n’y a pas d’espoir sans déboire ». Pour autant, les autorités politiques doivent éviter de tomber dans diverses chausse-trappes qui parsèment leur parcours. Parmi les remèdes proposés depuis l’issue des résultats référendaires, certains se profilent déjà comme de fausses bonnes idées, dont nous retiendrons pêle-mêle : appréhender le rejet de la constitution essentiellement sous l’angle de la communication ; l’annulation de référendums programmés ; refaire voter le peuple français et néerlandais sur le même texte en attendant la mise en place d’un nouveau gouvernement ; la demande d’un moratoire sur l’élargissement (en refusant notamment de suivre le calendrier des négociations d’adhésion avec la Turquie) au motif que cela «règlerait» le problème de la constitution… Les limites de la stratégie de communication Après la victoire du «non» en France et aux Pays-Bas, nombreux sont ceux qui ont estimé, parmi les partisans du «oui», que la communication était mauvaise, par le fait que les acteurs politiques avaient échoué à faire comprendre aux citoyens néerlandais et français le bien-fondé de la Constitution européenne. En l’occurrence, les électeurs avaient mal voté, à cause d’un déficit de communication et de pédagogie. Or, toute stratégie de communication est vouée à l’échec si elle ne fait pas un minimum écho aux réalités de la vie quotidienne des gens, et à leurs aspirations les plus profondes. Indépendamment du bien-fondé (ou non) des peurs de la population (que ce soit la peur du «plombier polonais», de la Turquie, la marginalisation du pays, voire de sa stigmatisation en cas de vote négatif…) qui se sont exprimées au cours de campagnes référendaires passionnelles et idéologiques, les autorités politiques ne peuvent les balayer d’un revers de la main, puisqu’elles ont, in fine, joué un rôle déterminant dans le vote des citoyennes et citoyens, majoritairement imperméables à des arguments d’ordre pragmatique et rationnel. C’est le cas, par exemple, d’une frange de la population, confrontée à des conditions socio-économiques particulièrement pénibles. Pour celle-ci, l’argument selon lequel «l’on n’avait pas le choix» (c’était à prendre ou à laisser) ou que l’on ne pouvait espérer un projet plus ambitieux pour l’Europe (celui qui était proposé étant le meilleur compromis possible conclu entre 25 États membres) s’apparentait à une résignation par rapport au rêve qu’ils nourrissaient pour l’Europe, dont celui d’un «grand soir européen». En exprimant haut et fort leur «non» à la constitution, ces citoyens espéraient enfin se faire comprendre par leurs gouvernements, au sujet de leurs réalités quotidiennes, de leurs attentes, de leurs craintes. Ils faisaient aussi part de leur rêve européen de voir émerger une Europe plus sociale faisant contrepoids à une Europe de nature essentiellement économique. Dès lors, si l’on peut regretter l’insuffisance d’information du citoyen européen sur les enjeux de la construction de l’Union européenne (l’élargissement, la monnaie unique…), ou déplorer la fâcheuse habitude prise par de nombreux gouvernements des États membres d’imputer à l’Europe tous les échecs de la politique nationale, notamment en matière de croissance et de création d’emploi, l’erreur à présent serait de croire qu’une bonne campagne d’information pourrait suffire à renouer le dialogue entre les différentes couches de la société et ses élites. À défaut de poser rapidement des actes concrets en matière de politique sociale et d’emploi, les acteurs politiques européens échoueront à convaincre les bienfaits des fondements de la construction européenne. L’on peut à cet égard regretter que les chefs d’État et de gouvernement aient raté leur premier test, lors du Sommet européen des 16 et 17 juin, à l’issue duquel ils ont été incapables de boucler un plan budgétaire européen ambitieux (les «perspectives financières» 2007-2013), à la hauteur des défis à relever pour l’Europe. Mise au frigo du débat européen Redoutant la contagion du «non» à la constitution, les chefs d’État et de gouvernement ont décrété au Sommet européen de juin dernier «une période de réflexion» de deux ans avant de poursuivre le processus de ratification du traité constitutionnel. Depuis le double échec référendaire en France et aux Pays-Bas, trois pays (le Royaume-Uni, le Danemark et la Pologne) ont postposé le référendum initialement programmé. Cette stratégie appelle quelques commentaires. En temporisant, les chefs d’État et de gouvernement nourrissent l’espoir de la ranimer lorsque le climat politique dans ces pays sera plus clément (l’idée étant, entre autres, d’attendre que les élections françaises soient passées en 2007). Toutefois, la vigilance s’impose. Il faut éviter qu’une période de réflexion prolongée fasse glisser l’Europe vers une pente savonneuse, l’UE s’enfonçant dans une sorte d’inertie, de peur, d’immobilisme ou, pire encore, de paralysie. L’arrêt du processus référendaire comporte en effet de nombreux risques et est dommageable à plus d’un titre. D’abord, parce qu’il casse la formidable dynamique citoyenne et démocratique européenne amorcée par les référendums en France et aux Pays-Bas, et qui témoigne, au travers de la confrontation de différentes visions de l’Europe, de la forte mobilisation citoyenne à propos de la construction européenne. Ensuite, parce qu’il laisse à penser que les États ne sont prêts à consulter leur population que dans la mesure où ils apportent la réponse escomptée. Enfin, en gelant le débat, les chefs d’État et de gouvernement cautionnent la stratégie du statu quo, du business as usual, qui a justement été condamnée par les populations françaises et néerlandaises ! Pire encore, en privilégiant la pause du processus de ratification de la constitution, les chefs d’État et de gouvernement prolongent la crise identitaire européenne et alimentent, du même coup, l’affaiblissement de la France et des Pays-Bas, qui forment le noyau dur de la construction européenne. En ce sens, les citoyens français et néerlandais qui ont exprimé leur refus de la constitution risquent à nouveau d’avoir le sentiment de ne pas avoir été entendus par leurs leaders, la période de réflexion servant d’alibi pour mettre en sourdine leur révolte, le rejet, pour une majorité des Français, de l’Europe libérale. En outre, le moteur franco-allemand étant momentanément en panne, l’Europe se trouve à présent sans véritable leader. En adoptant une «stratégie d’attentisme», les chefs d’État et de gouvernement ouvrent le chemin de la victoire d’une vision de l’Europe, non pas celle d’une Europe politique, mais celle d’une Europe minimaliste, du grand marché. Les eurosceptiques ne manquent d’ailleurs pas de jouer des raisons contradictoires qui ont fait vaincre le camp du «non» pour plaider paradoxalement pour le statu quo, ou pire, pour défendre la thèse qu’il faut «moins d’Europe»… Pour éviter ce scénario, la mobilisation de l’ensemble des forces progressistes confondues s’impose. S’il est vrai que le «non» français (qui s’explique principalement par le caractère trop libéral du texte) diffère du «non» néerlandais (justifié principalement par l’insuffisante influence des Pays-Bas, la perte de souveraineté, d’identité), elles se doivent de saisir la dynamique créée par le «non de gauche» pour revendiquer un changement de cap dans la construction européenne, et pour la remodeler à l’image des attentes de leurs citoyens. Quand la crise est féconde D’aucuns estiment que la méthode référendaire n’est pas appropriée pour un texte aussi long Le traité constitutionnel contient près de 200 pages, comprenant 448 articles, 36 protocoles, et 50 déclarations et compliqué. L’idée étant que l’usage du référendum doit être limité à une question aussi simple que possible. Pourtant, si le choix d’un référendum comporte certains risques (l’expérience enseigne que les réponses aux référendums sont influencées par des considérations étrangères à la question posée), il s’est révélé être un outil remarquable pour mobiliser les citoyens, réveiller leur intérêt pour la construction européenne, et enfin, leur faire reprendre le chemin des urnes, après qu’ils l’eurent si souvent délaissé lors des derniers scrutins européens. En ce sens, il a offert, par la richesse et l’intensité des débats suscités, une occasion historique pour les citoyens de se réapproprier l’UE, et de donner corps à un début «d’espace civique européen». À présent, pour débattre de l’avenir de l’Union, et renouer le dialogue entre les dirigeants politiques et les populations européennes, la convocation d’un «super référendum européen» s’impose pour dépasser les logiques strictement nationales et dégager de nouvelles perspectives européennes. Un référendum qui porterait uniquement sur les parties constituantes du traité (la partie I et II) car ce sont elles seules qui ont été discutées par les conventionnels et qui définissent les objectifs, les valeurs, et les principes-clés sur lesquels doit se construire l’Europe. En scindant les trois parties du traité constitutionnel qu’on nous a présenté comme un paquet ficelé, l’on en reviendrait ainsi à l’esprit d’une constitution européenne. Quant à la partie III du traité (les politiques de l’Union), qui n’a pas fait l’objet d’un débat de fond à la Convention, elle devrait resurgir à l’occasion d’un vaste débat démocratique au moyen de la convocation d’une nouvelle Convention, à laquelle seraient étroitement associés les partenaires sociaux et la société civile dans son ensemble. Car si l’UE affiche les objectifs d’«économie sociale de marché», de développement durable, de plein emploi, de la protection de la santé publique,… elle se doit de définir, en toute cohérence, les « outils » pour les atteindre. Enfin, face à la difficulté de concilier la pluralité des projets européens (Europe marché versus Europe politique, Europe puissance civile versus Europe puissance militaire, Europe fédérale versus Europe intergouvernementale), il convient d’approfondir l’idée d’intégration européenne différenciée – au moyen de l’activation du mécanisme de «coopération renforcée» entre États prévue dans les traités -, qui se présente aujourd’hui comme la seule issue possible pour concilier les ambitions politiques de chacun, sans contraindre ceux qui nourrissent un projet ambitieux pour l’Europe de s’aligner sur le plus petit dénominateur commun.