Politique
Chéri, maintenant on peut divorcer !
19.04.2007
Le nouveau projet de législation sur le divorce de Laurette Onkelinx, ministre de la Justice, introduit deux nouveaux changements fondamentaux dans notre conception commune du mariage civil. En effet, historiquement, les procédures de divorce étaient canalisées vers le divorce pour faute, c’est-à-dire la «guérilla» des preuves et des attestations. Les conséquences de cette situation étaient préjudiciables à plus d’un titre : le processus obsessionnel de recherche des torts inhibe d’éventuelles possibilités de réconciliation ; la focalisation de la recherche de faute détournait l’attention portée à l’estimation précise des biens revenant à chacun des époux et à l’évaluation de leurs besoins respectifs, alors que le salaire des femmes est inférieur à celui des hommes et que, majoritairement les femmes ont la garde des enfants et donc la charge financière la plus lourde. Réjouissons nous que dorénavant l’adultère ne soit plus considéré comme une faute civile, pouvant justifier la rupture unilatérale du mariage, aux torts du conjoint «pêcheur». À chacun et chacune de gérer ses relations intimes, sans que la justice de la famille n’ait à juger nos conflits conjugaux. On s’aime, on ne s’aime plus, tu me trompes, je te trompe, on se quitte, tu me quittes,… tort ou pas tort, nos raisons n’intéressent plus les tribunaux et tant mieux. Tant que l’on n’en vient pas aux mains et autres maltraitances, le contrat qui lie deux conjoints peut désormais être défait à la simple demande d’une des parties ou encore mieux des deux, et cela au plus vite, sans tergiverser. Le mariage civil est un contrat entre adultes majeurs et vaccinés, qui font et défont leurs engagements patrimoniaux et d’entraides réciproques. On peut évidemment s’interroger sur le maintien dans le code civil de l’engagement de fidélité, qui nous renvoie toujours au péché d’adultère et sa connotation morale. Privé de sanction tout de même, le serment de fidélité devient désuet, obsolète malgré sa surcharge affective et morale. Le plus simple serait de le supprimer des sermons du mariage ou de lui affubler un texte plus moderne se référant à l’attache privilégiée qui nous unit à l’autre, au respect mutuel des attentes et des aspirations de chacun dans la vie commune… ou tout simplement au devoir de ne pas s’ennuyer ensemble. L’autre modification réside incontestablement dans la reconnaissance indirecte de l’égalité des droits et des devoirs des conjoints, au travers des nouvelles règles qui prévalent dorénavant en matière de rentes alimentaires et de la généralisation de la garde alternée de la progéniture. Cette modification majeure reconnaît enfin une vraie égalité entre les époux face à la prise en charge des enfants ! La rupture du contrat de mariage place ainsi les ex-conjoints face à leurs responsabilités partagées en matière de prise en charge et d’éducation des enfants. Si effectivement, la situation professionnelle des femmes est plus que précaire par rapport aux hommes sur le marché du travail, il n’est pas judicieux d’attendre d’une loi sur le divorce qu’elle résolve les inégalités économiques acquises avant, pendant et après le mariage. Ce n’est pas à la loi sur le divorce de résoudre les inégalités de revenu qui persistent, de fait, entre hommes et femmes. Laissons cela au combat syndical qui nécessite de se soucier de l’inégalité de traitement des hommes et des femmes, peu importe la situation civile des protagonistes. Heureusement, cette modification de la loi sur le divorce sonne la fin du procès du sexe masculin et de la victimisation outrancière des femmes. L’enjeu est bien de libérer les hommes du spectre de la faute perpétuelle et l’infantilisation croissante des femmes ramenée à de pauvres femmes abandonnées. Gageons que cette modification de la loi sur le divorce amènera bons nombres d’hommes et de femmes à éviter des procédures judiciaires déchirantes et avilissantes pour réussir une séparation sans douleur. Ceci allègera ainsi les uns et les autres de la peur omniprésente du jugement dernier et débouchera sur des pratiques nouvelles du moindre mal, de la moindre souffrance, de la moindre injustice, bref ce que nous appelons volontiers une politique de la famille laïque, fraternelle et solidaire.