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Certificat PEB : pourquoi il va falloir changer les règles

Montage Politique © Alexander Fastovets – Unsplash
Montage Politique © Alexander Fastovets – Unsplash

Malheureusement, un bon PEB n’est pas une garantie de bien-être à domicile. En cause ? Le changement climatique, qui ne semble pas avoir été pris en compte dans les calculs actuels. Un article de la plume de Caroline Van Wynsberghe, rédigé dans le bureau d’un logement trop bien isolé.

L’incertitude plane sur les primes à la rénovation. En Wallonie, la déclaration de politique régionale de juillet 2024 semble marquer la fin des primes, pour privilégier des incitants fiscaux ou des prêts. Et dans la capitale, le budget prévu pour les primes à la rénovation en 2024 n’est pas suffisant pour couvrir toutes les demandes et le flou demeure concernant le prochain gouvernement. 

Ces aides publiques ont en commun d’être conditionnées à la « performance énergétique des bâtiments » (PEB) attestée par le fameux certificat PEB. Mais est-ce l’outil le plus adéquat pour mesurer l’isolation, singulièrement dans le cadre du réchauffement climatique ?

Le PEB, pour quoi faire ?

De manière très simple, on peut considérer que le PEB évalue l’isolation et les risques de déperdition d’énergie, mais aussi les besoins en chaleur d’un bâtiment ou d’un appartement. Avec la crise des prix de l’énergie, le PEB est en outre devenu un instrument de la politique des loyers, selon le principe que meilleur est le PEB, moins les locataires paient. 

Effectivement, avec un bon PEB, on a moins besoin de chauffer le logement. Cela est dû à la bonne isolation, mais également au fait que tout est conçu pour garder la chaleur. Ce parti-pris en termes de rénovation et de construction est particulièrement efficace pour le froid de l’hiver. 

Sauf que…

La contrepartie, mais non des moindres, est qu’on passe à côté d’une problématique pourtant très aiguë et actuelle : le réchauffement climatique. Si un rayon de soleil hivernal suffit à chauffer une pièce malgré le gel dehors, un rayon de soleil d’été transforme rapidement un logement ou un bureau en cocotte-minute, certainement si les températures extérieures grimpent également. 

C’est d’autant plus vrai que les normes de construction ou de rénovation ne semblent pas imposer de stores ou de volets extérieurs. Par ailleurs, le système de ventilation double flux qui va de pair avec une bonne isolation n’est pas un dispositif de conditionnement d’air.

Un appartement avec un bon PEB n’est que rarement un appartement conçu pour l’été.

Même quand les températures extérieures passent, la nuit, sous les 20° (et souvent sous les 15), celle à l’intérieur tourne toujours autour des 24-25°, voire les dépasse en cas de pic de chaleur.

Disons-le clairement : un appartement avec un bon PEB n’est que rarement un appartement conçu pour l’été en Belgique en 2024. Les personnes qui ont fait bâtir il y a une dizaine d’années racontent toutes avoir entendu les architectes expliquer que, de toute façon, en Belgique, il y a très peu de soleil et que donc des volets sont tout-à-fait inutiles. 

Pourtant, il est probable qu’on ait tenté, dans le même temps, de convaincre les néo-propriétaires d’installer des panneaux photovoltaïques. Or, s’il y a assez de lumière pour faire tourner le dispositif, il peut y avoir suffisamment de soleil pour chauffer le logement et ainsi le rendre invivable lors d’épisodes chauds (sans parler des périodes de canicule).

L’heure (un peu tardive) de réviser les critères

Comme d’autres1, je me demande pourquoi les normes de construction et de rénovation n’ont pas entre-temps été adaptées à la réalité du réchauffement climatique. On le sait, les événements extrêmes vont se multiplier et ce n’est pas, en Belgique, qu’une question de pluviométrie. Il va également faire plus chaud, sans doute pas de manière linéaire, mais on va certainement connaître plus de pics de chaleur. 

La chaleur provoque l’irritabilité, accroit les risques cardiovasculaires et les problèmes liés aux maladies chroniques.

L’enjeu de l’isolation des bâtiments est aujourd’hui essentiellement envisagé dans une perspective financière (combien cela coûte pour chauffer une « passoire énergétique » ?), mais il s’agit également d’un problème de santé publique dont je m’étonne qu’il n’ait pas été une priorité lors de la dernière législature. 

La chaleur provoque l’irritabilité (d’où ce billet d’humeur), mais accroit surtout les risques cardiovasculaires et les problèmes liés aux maladies chroniques. On commence à réaliser qu’il faut (re)verdir l’espace public et prévoir de l’ombre en rue, mais il semblerait que personne n’ait pensé à se préserver du soleil dans son logement ou sur son lieu de travail (même si on voit sensiblement plus de dispositifs occultants externes sur les bâtiments de bureaux). C’est pourtant une caractéristique essentielle du bâti dans les pays chauds. 

Les nouveaux gouvernements vont devoir plancher sur la forme des incitants visant à rénover le bâti.

Bien sûr, limiter les déperditions d’énergie dans les bâtiments est essentiel, par mesure d’économie, ainsi que comme instrument de politique climatique. Les nouveaux gouvernements vont devoir plancher sur la forme des incitants visant à rénover le bâti existant, mais il faudra également réfléchir aux buts de la rénovation. On ne peut plus aujourd’hui faire l’impasse sur une bonne isolation pour l’été également. C’est une question de bien-être et de santé publique.