Politique
« Blokophobe »
16.02.2006
Si j’étais le responsable de campagne du Vlaams Blok/Belang, je sabrerais le champagne. Voyez-vous ça: ces «basanés» ont même réussi à bourrer le crâne d’une femme bien de chez nous pour qu’elle en arrive à se faire exploser au nom du jihad. Dommage que ce n’était pas une Flamande de pure race, seulement une habitante de Charleroi. Mais soit, ne faisons pas la fine bouche. Comme moyen de propagande, ça vaut son pesant d’or. Puis il y a ces perquisitions Ndlr : il s’agit de perquisitions menées ces derniers moins chez différentes personnes suspectées de liens avec des organisations terroristes , qui démontrent une fois pour toutes que «l’ennemi» est dans nos murs — ces quelques idiots utiles qui réussissent à jeter l’opprobre sur toute la communauté allochtone du pays. Un pays où, d’ailleurs, un enseignant est mis à pied parce qu’il avait osé envoyer une blague raciste — une blague, Madame, Monsieur — sur son ordinateur. Lui, il perd son job, mais les «basanés», on ne les inquiète pas. Non, vraiment, les publicitaires du Blok/Belang n’auraient pas pu mieux trouver. Et comme si ça ne suffisait pas, certains en rajoutent une couche dans la perspective de la campagne pour les élections communales. Un certain nombre de personnalités politiques veulent traîner le Blok/Belang devant le Conseil d’État dans le but de le priver de sa dotation publique. La déclaration de Philip Dewinter, selon laquelle le Blok/Belang serait un parti «islamophobe», constituerait une infraction en regard de la loi réprimant le racisme. Indépendamment du fait que la moitié de la population ne comprend même pas le sens du mot «islamophobe», la question est effectivement de savoir s’il en est bien ainsi. Étymologiquement, ce terme ne signifie rien d’autre que : «Avoir peur de l’islam». Eh bien, peut-être certains hommes politiques démocrates seront-ils étonnés d’apprendre que certaines de mes voisines partagent cette peur. Une peur quelquefois fondée, le plus souvent non fondée, face aux jeunes qui traînent dans le quartier, à la violence des fondamentalistes qu’ils voient à la télé et qu’ils identifient à l’islam. Elles ont tort et j’essaie de les en convaincre, mais il ne me viendrait jamais à l’esprit de les criminaliser comme racistes seulement parce qu’elles ont peur. Je suis moi-même «blokophobe» — j’ai peur que ce parti ait un jour l’occasion de mettre en pratique ses principes et ses modèles de société. Chacun a bien le droit d’avoir ses propres peurs, me semble-t-il. Dans ce sens, le terme «islamophobe» ne relève pas du racisme, et même si tel devait être le cas, reste la question de savoir jusqu’où le principe de liberté d’opinion protège aussi ces idées répréhensibles. La loi tranche la question en stipulant que le racisme n’est pas une opinion mais un délit. Et, diront les hommes politiques, les lois sont faites pour être appliquées. C’est sans doute vrai, si on s’en tient strictement sur le terrain des principes. Cela n’en reste pas moins une stupidité stratégique. Car, Madame, Monsieur, «l’establishment», via «un tribunal dominé par la maffia du PS», nous a coupé les vivres seulement parce que «nous disons ce que vous pensez». Ça ne fera que renforcer le Blok/Belang sans qu’il doive lever le petit doigt. C’est ce que nous faisons depuis une bonne vingtaine d’années déjà. On ne devrait donc plus s’étonner, mais tout de même.