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Relations Ecolo-syndicats : l’avis d’une pastèque (uniquement en ligne)

Pastèque : verte à l’extérieur, rouge à l’intérieur.

En l’absence de pilier et de relais « traditionnels », et après la défaite cuisante de mai dernier, il est utile qu’Écolo fasse l’analyse de ses relations avec la société civile. Or, parmi celle-ci, les syndicats jouent encore un rôle important, même s’ils peuvent sembler moins influents qu’auparavant.

Mais pourquoi le premier parti qui semble parler au cœur des syndicalistes reste-t-il le PS plutôt qu’Écolo ?

Ayant exercé la fonction d’accompagnateur des travailleurs sans emploi et de conseiller pour un secrétariat régional de la FGTB, alors qu’aujourd’hui je travaille pour Écolo, je vais tenter d’apporter un point de vue personnel sur les relations « amour-haine » qui règnent parfois entre Écolo et les syndicats, particulièrement la FGTB. Dans les organes régionaux, la relation des syndicats au monde politique semble beaucoup plus discrète, ou en tout cas moins instituée, à la CSC qu’à la FGTB. Le spectre des relations parait également plus large, plus ouvert, chez les verts que chez les rouges qui ont une relation plus affichée avec le PS. Mais cela, c’est la théorie institutionnelle. En effet, les rapports qu’entretiennent les différents permanents ou mandataires syndicaux avec le monde politique varient énormément selon les personnes, allant du néant au militantisme affiché. Chez les délégués syndicaux, l’appartenance politique se dilue encore quelque peu, et c’est chez les « simples » membres que le panel est le plus large, certains soutenant même des idées de droite (parfois limite extrême). Cela n’a rien d’étonnant puisque logiquement les « cadres » syndicaux ont une conscientisation politique plus importante, notamment acquise grâce aux diverses formations organisées par leurs organisations. Mais pourquoi le premier parti qui semble parler au cœur des syndicalistes reste-t-il le PS plutôt qu’Écolo, particulièrement à la FGTB, alors que l’idéologie et les pratiques politiques écologistes semblent plus proches de l’idéal syndical (cette affirmation est bien sûr toute personnelle) ? Pour caricaturer et simplifier à l’extrême, je pourrais dire que le « bobo » et le « prolo » ne se comprennent pas car ils ne parlent pas la même langue et souvent n’ont pas eu le même parcours… Les perceptions et langages sont bien différents entre le monde des solidarités « chaudes » (le monde associatif de manière générale, milieu où la réalité des gens est vécue quotidiennement) et le monde des solidarités « froides » (le monde politique, particulièrement écologiste, qui doit analyser objectivement les situations et faire de la prospective à long terme afin d’amener des changements structuraux). Ces deux échelles de temps ainsi que la différence des outils d’analyse (le « vécu » contre la « science ») engendrent de nombreux malentendus, quiproquos, voire même rejets ! Les meilleurs arguments du monde auront bien du mal à convaincre un ouvrier du secteur pétrolier du bien-fondé des énergies renouvelables… Cette réalité peut tout autant se rencontrer au sein même du milieu syndical, il suffit de regarder à quel point il est compliqué d’articuler des positions « interprofessionnelles », pourtant bien nécessaires.

La confiance avant tout

Alors que faire ? Une analyse ou proposition n’a de sens, quelle que soit sa pertinence, que si elle est partagée. Il ne s’agit pas de sombrer dans le simplisme ou le poujadisme, ce qui est parfois l’apanage de certains, mais bien de vulgariser les constats et propositions écologistes. Pour faciliter cette vulgarisation, établir un climat de confiance est primordial. Pour y parvenir, rien ne vaut la rencontre, la discussion franche. Malheureusement, le syndicaliste et l’écologiste ont parfois du mal à briser la glace, à passer au-delà des a priori. Et puis, certaines visions restent fort divergentes, le monde syndical restant souvent imperméable à de nouvelles idées ou visions. Toute la « théorie syndicale » reste par exemple basée sur la sacro-sainte croissance économique, dont on connaît pourtant toutes les limites. Enfin, j’ai parfois l’impression que les attentes envers Écolo sont supérieures par rapport aux autres partis. Les coups de couteau dans le dos assénés par les socialistes à la cause syndicale sont nombreux, mais il semble qu’on leur en tienne moins rigueur qu’à la moindre petite erreur des Verts. C’est un signe encourageant, cela démontre que les attentes sont grandes, que de nombreuses personnes sont prêtes à embrayer avec nous, mais cela induit aussi une pression énorme et néfaste. Afin qu’Écolo puisse s’assurer le relais, au moins partiel, des structures syndicales pour continuer à construire et asseoir son projet de société, je pense qu’il faudra appliquer la stratégie du caméléon, en adaptant notre discours à chaque public, en continuant à garder notre ouverture, mais aussi en devenant plus concret. Et puis peut-être que de temps à autre il faudrait arrêter de tendre l’autre joue lorsqu’on est giflé…