Retour aux articles →

Les migrations : problème ou solution ?

Ni l’un, ni l’autre. Si on s’attarde sur les migrations liées au travail, le problème réside surtout dans un marché de l’emploi trop dérégulé, favorisant le dumping social et le travail précaire. Plutôt qu’une politique policière (contrôle aux frontières), c’est d’une réelle politique d’emploi dont l’Europe a besoin.

Dire que le contexte actuel est post-migratoire est une vérité partielle : elle ne concerne que les cohortes de migrations arrivées après la Seconde Guerre mondiale. Pour autant, la situation n’est pas celle de la fin des migrations. Identiquement, le syndicalisme est incontestablement un puissant facteur d’intégration par la solidarité, lorsqu’il a affaire à des migrants avec papiers. Lorsqu’il s’agit de migrants sans-papiers, c’est plus compliqué : certes, il y a des initiatives, mais la tendance la plus forte n’est pas celle-là. En même temps, il ne faut pas jeter la pierre aux syndicats : aujourd’hui, les travailleurs sont mis en concurrence ; de puissantes forces visent à détruire les solidarités ; il est très difficile d’aller à contre-courant.

Photographie des migrations actuelles

Les migrations actuelles sont composées d’une immigration régulière et d’une immigration irrégulière. Il y a cinq portes d’entrée à l’immigration régulière : le regroupement familial, l’asile, les études, le travail, le visa. L’immigration irrégulière commence souvent à l’expiration d’un visa : c’est-à-dire que les personnes sont d’abord rentrées régulièrement. On estime à quelque 100 000 les immigrés clandestins en Belgique Au niveau de l’Union européenne, les estimations se placent dans une fourchette, qui va de 1,8 à 3,6 millions de personnes , mais ce n’est pas figé. On a, en effet, affaire à des flux : à tout moment, des personnes entrent dans la clandestinité tandis que d’autres en sortent (en rentrant chez elles, ou en étant régularisées). À cela s’ajoute une migration très importante de travailleurs de pays membres de l’Union européenne : la liberté de circulation et d’accès au travail est totale pour les citoyens de 25 pays. Quant aux deux derniers pays arrivés, la Bulgarie et la Roumanie, il y a liberté de circulation, mais restriction dans l’accès au marché du travail : pour eux, la liberté d’établissement est conditionnée au fait de prouver, après trois mois, qu’on dispose d’un revenu, par le travail ou toute autre voie. Quantitativement, 2,1% des citoyens européens ont fait usage de cette liberté : cela représente 10,584 millions de personnes sur 504 millions d’Européens. En 2010, l’immigration légale en Belgique (en y incluant les Européens) a concerné 140 375 personnes Sources : OE, Eurostat, « Evolutions du nombre d’immigrations légales et du nombre de demandeurs d’asile », 1996-2010 , auxquelles on peut ajouter 21 815 demandeurs d’asile, soit un total de 162 190 personnes On traite ici des flux d’entrée. La différence avec les chiffres cités par Edouard Delruelle dans ce même numéro s’explique par le fait qu’ils ne visent pas la même chose : Edouard Delruelle parle du solde entre les flux, d’entrée et de sortie. Par quelles portes d’entrée les migrants réguliers arrivent-ils Sources : OE, Eurostat, « Répartition des premiers titres de séjour délivrés selon le motif de délivrance pour la Belgique et ses pays voisins », 2010 ? Le flux le plus important (42,4%) est lié au regroupement familial. Cela est appelé à baisser très prochainement, car une nouvelle loi restreint fortement la possibilité pour les Belges, c’est-à-dire, en toute hypocrisie, principalement les Marocains et les Turcs ayant acquis la nationalité belge. Les études : 8,4%. Les personnes qui demandent le séjour pour venir travailler dès lors qu’elles ont un permis B Le permis modèle B est un permis de travail valable chez un employeur bien précis, pour un emploi déterminé et pour une durée maximale de 12 mois renouvelable : 6,1%. Les personnes bénéficiant du statut de réfugiés : 3,7% Ce pourcentage est bas, dans cette statistique tirée d’Eurostat : selon les sources, les critères ne sont pas identiques. Eu égard à nos propres « habitudes » de Belges, il est probable qu’on retrouve une partie des réfugiés dans d’autres sous-ensembles, en particulier celui des « autres raisons ». Les personnes autorisées pour des raisons humanitaires : 17,7%. Enfin, 21,8% sont reprises dans une catégorie « autres raisons ». Cela recouvre des réalités très diverses, dont celle de la régularisation. Les choses se présentent différemment selon les pays. Ceux de l’Europe du Sud sont nettement plus concernés par les migrations pour cause de travail (50,5%). Quant aux 12 nouveaux États membres de l’Union, cette même motivation concerne 60,4% de la migration ! Si on s’attache à la seule migration pour cause de travail – autrement dit, qui obtient un premier permis de travail B – on a affaire très majoritairement à des ressortissants de l’Union européenne. La statistique indique une très forte hausse des demandes pendant la période 2006 – 2008 Source : SPF Emploi, « Premiers permis de travail B délivrés par grands groupes de nationalité », 2000- 2009 : cela correspond à l’entrée de la Roumanie et la Bulgarie dans l’Union, et au fait qu’à cause des restrictions qui leur sont imposées dans l’accès au marché de l’emploi, ils doivent préalablement demander un permis B pour venir. Par contre, la statistique baisse en 2009, année où les ressortissants des 10 États entrés précédemment dans l’Union reçoivent quant à eux le plein accès au marché du travail : ils n’ont plus besoin de permis B, mais il est probable qu’un nombre significatif d’entre eux continuent à travailler chez nous. Au total, 2008 a été l’année de la délivrance du plus grand nombre de permis B, soit 25 000. Le permis B, c’est une affaire de salariés : c’est d’ailleurs l’employeur qui fait la demande pour le compte du travailleur qu’il veut engager. Mais on peut également venir travailler comme indépendant dès lors qu’on a accès à la profession et qu’on peut présenter un plan crédible. En réalité, beaucoup plus de migrants arrivent comme indépendants : ils ont été près de 80 000 en 2010. Mais, ici encore, la cohorte la plus importante est celle des ressortissants de l’Union. Les pays tiers ne pèsent que 10 000, la statistique étant assez constante sur la durée Source : Inasti, « Evolution du nombre d’indépendants inscrits à l’assurance obligatoire par groupes de nationalité au 1er janvier », 2001-2010.

Effets économiques

Les migrations ont différents effets, mais ils ne sont pas toujours ceux que colporte la rumeur publique. D’abord, sur les finances publiques et la sécurité sociale, toutes les études menées arrivent à peu près au même résultat : hier et aujourd’hui, l’effet est marginal, tantôt légèrement positif, tantôt légèrement négatif. Mais ce constat ne dit rien de l’avenir : comment cela peut-il évoluer ? L’équation économique la plus courante évoque un cercle vertueux : croissance de la population = croissance de la taille de l’économie = croissance du nombre d’emplois = croissance des cotisations perçues + croissance de la consommation. Cette vision optimiste est altérée par le fonctionnement actuel de l’économie et la dérégulation massive du marché du travail ; il n’est dès lors pas du tout certain que, dans le futur, l’équation va se vérifier de manière aussi simple qu’ici formulée. Quant aux effets sur le marché du travail, ils dépendent des secteurs. On peut formuler l’hypothèse que pour ce qui est des pays tiers (hors UE), les migrations sont plus complémentaires que substitutives : elles ne prennent pas les emplois des Belges ; elles occupent les emplois dont les Belges ne veulent plus. Complémentairement, les observations de terrain permettent de cumuler de nombreuses informations. Les segments de l’économie qu’occupent les migrants sont : le domaine du « care » (c’est-à-dire celui des soins jadis donnés par les femmes lorsqu’elles restaient à la maison, par exemple à l’égard des personnes âgées), la santé, le nettoyage, les fonctions subalternes de l’Horeca et les tâches moins qualifiées dans la construction. À l’exception du domaine de la santé qui n’occupe quasiment que des migrants légaux, tous les autres emploient des sans-papiers aux côtés de légaux. On assiste à la résurgence de l’activité informelle dans certains quartiers, autour de petites boutiques, épiceries, boulangeries, boucheries, salons de coiffure. En général, il y a un travailleur en règle pour un ou deux qui ne le sont pas. Mais, à y réfléchir, ce n’est pas si différent de l’époque où ce type de magasins était tenu par des Belges, qui mobilisaient souvent l’aide de la famille, enfants compris, qui travaillaient donc, sans pour autant être recensés et financés comme tels. Beaucoup de migrants sont pris dans les filières intra-communautaires, qui peuvent s’avérer de solidarité et/ou d’exploitation, selon les cas : l’ambivalence est réelle. La régularisation par le travail décidée en 2009 en réponse à un long combat des mouvements sociaux ne donne pas de bons résultats. Hypocrite dans sa conception, elle est une impasse pour les personnes. Contrairement à ce qui s’est fait en Italie ou en Espagne, où on a régularisé les gens dans l’emploi qu’ils occupaient, la Belgique a exigé des candidats à la régularisation qu’ils présentent un contrat d’emploi en bonne et due forme, à temps plein, et aux normes des conventions collectives, le tout sans qu’il soit question d’avoir des relations préalables avec l’employeur : si de telles relations se découvrent, la régularisation devient impossible ! Dès lors, les sans-papiers ont cherché une issue : certains ont acheté de faux contrats ; d’autres sont parvenus à en obtenir un de leur employeur, mais dans des conditions qui les ont placés en situation de dépendance, de précarité absolue, voire de chantage (lorsque les patrons ont exigé du sans-papiers qu’il rembourse tous les coûts additionnels que représente le passage du travail noir au contrat légal). Au total, cela fera au mieux 10 000 personnes régularisées de manière précaire, car elles doivent prolonger leur contrat et renouveler leur permis B annuellement ; titre de séjour et permis B par ailleurs prolongés que si l’employeur s’est acquitté totalement de ses cotisations sociales !

Construction et nettoyage industriel

La focale mérite d’être placée sur deux secteurs particuliers : la construction et le nettoyage industriel. Le secteur de la construction est caractérisé par une forte articulation entre le formel et l’informel ; des chaînes de sous-traitance se mettent en place, de plus en plus longues et complexes. Globalement, le nombre d’emplois y a augmenté, alors que le volume des travailleurs salariés aux normes s’est réduit, au profit de travailleurs indépendants (belges et européens, dont beaucoup de faux indépendants) et de travailleurs détachés (principalement roumains, bulgares et polonais). Une directive européenne permet en effet aux entreprises d’autres pays membres de venir travailler chez nous, les travailleurs étant payés au salaire net en vigueur dans notre pays, alors que les cotisations sociales doivent être payées dans le pays d’origine, et aux taux du pays d’origine. Concrètement, il y a très peu de contrôles : dès lors ces conditions minimales sont très peu respectées, ce qui provoque un important dumping social. La concurrence est extrêmement forte dans le secteur : les prix sont toujours poussés à la baisse. Là où il serait normal que l’État contrôle, l’Europe pousse à plus de libéralisation. En définitive, les règles y sont bafouées quotidiennement en d’innombrables chantiers. La main-d’œuvre du secteur du nettoyage industriel est, quant à elle, massivement d’origine étrangère (90%). Ici aussi, la concurrence est très forte et les sous-traitances se pratiquent en cascade : de grosses entreprises soumissionnent, prennent un marché mais n’y travaillent pas, elles sous-traitent non sans avoir pris leur commission au passage. Les entreprises en dessous respectent de moins en moins les obligations légales, jusqu’au bas de la chaîne où on ne respecte plus rien du tout. L’État est complice : la société prise pour le nettoyage de la Gare du Nord à Bruxelles a soumissionné à un prix qui rend impossible que ses travailleurs soient payés aux normes Source : FGTB, secteur nettoyage. Il faudrait à tout le moins réfléchir aux modalités de contrôle et à ce qu’il faut mettre dans les cahiers des charges !

Problème ou solution ?

En définitive, les migrations sont-elles un problème ou une solution ? On ne peut répondre qu’en faisant différentes balances. Par rapport au problème du « papyboom » : on a besoin de nouvelles forces de travail pour assurer le paiement des pensions (+), mais on n’a aucune garantie d’évolution positive du marché de l’emploi : si les emplois sont détruits, l’objectif ne sera pas atteint (-). Les migrations des pays tiers sont plus complémentaires à l’emploi des Belges que substitutives (+), mais les migrations européennes peuvent s’avérer férocement concurrentielles par rapport à nos travailleurs et notre marché du travail : la directive « détachement » a un impact effroyable (-). Les migrations ont un effet redistributeur extrêmement important en faveur des pays d’origine ; les migrants y envoient plus d’argent que la coopération officielle (+). Bémol : les moyens qui arrivent dans le pays d’origine ne sont pas systématiquement investis de la façon la plus dynamique : une forme d’économie de la rente peut s’installer (+/‑). Quant au pays d’accueil, l’effet redistributeur y semble inverse : toutes les données montrent des transferts progressivement plus importants du facteur travail vers le facteur capital (-). Il y a une vérité à regarder en face : oui, les migrants émargent proportionnellement plus au chômage et à l’aide sociale (-), mais, pondération à la dureté du constat, on peut au moins interpeller : qu’a-t-on fait dans nos écoles ces 50 à 60 dernières années pour faire en sorte que chacun obtienne un bon diplôme qui lui permette efficacement de rejoindre le marché de l’emploi ? Et qu’a-t-on fait pour supprimer toutes les discriminations qui sont autant d’obstacles à l’emploi ? Les migrations sont principalement le fait de populations en âge de travailler (+), mais ces populations vieillissent, comme tout le monde (-). Finalement, les migrations, problème ou solution ? En réalité : ni l’un, ni l’autre.

Idées reçues

Avec toutes les données, nous avons du matériel pour répondre à toutes sortes d’idées reçues. Tant que nous y sommes : tordons- leur le cou. Ce sont les plus pauvres qui viennent, du coup on doit les aider et ça coûte. Non, ce ne sont pas les plus pauvres qui arrivent chez nous. Tout simplement parce que l’extrême pauvreté assigne à résidence. Une seule exception existe, celle des familles Roms, qui tout à la fois circulent et sont dans l’extrême pauvreté. Les immigrés viennent occuper notre marché du travail. Il y a une migration par le travail, mais elle est essentiellement intra-européenne, en provenance principalement des nouveaux pays membres. Les migrants squattent l’espace du travail au noir. Non, toutes les études le montrent : l’essentiel du travail au noir est exécuté par des travailleurs qui sont d’abord dans la légalité, et se trouvent des « compléments ». En second rang, le travail au noir est le fait de personnes au chômage ou relevant d’un CPAS, souvent dans une logique de petits arrangements pour la survie ou au moins l’amélioration de mauvaises conditions. En dernier lieu seulement, les migrants sans-papiers. Ils viennent prendre le travail des Belges. Non, ils viennent simplement prendre le travail que les Belges ne veulent plus faire, pour cause de pénibilité des conditions de travail. On ne peut pas accueillir toute la misère du monde. Non, c’est évident. Mais on peut être rassuré : on ne l’accueille pas ! Dans le monde, on dénombre 740 millions de personnes déplacées en interne, c’est-à-dire qui quittent leur région d’origine sans pour autant quitter leur pays ; 214 millions ont quitté leur pays, dont 43,3 millions ont été forcées à le faire ; parmi elles, moins d’un million a demandé l’asile. Trois quarts des réfugiés sont accueillis par l’Afrique et l’Asie, pour un quart par l’Europe.

Dérégulations

En définitive, le problème est moins le travail des migrants que les politiques de dérégulation du marché du travail : cela se passe en dehors des sphères d’influence des migrants, mais ils s’y engouffrent. Nous-mêmes , dans nos comportements de consommateurs, ne sommes pas à l’abri de la critique, qui voulons toujours acheter au moindre prix, sans nous tracasser des conditions faites aux producteurs : nos attitudes de consommateurs sont des encouragements à la dérégulation. La concurrence est énorme entre les entreprises et les travailleurs. La logique du profit maximal fait des salaires la variable d’ajustement. Il en résulte deux modalités de délocalisation : Soit vers ailleurs, là où les coûts de production sont moins chers ; Soit « sur place » : il est en effet des biens et services qu’on consomme ici et qu’il est impossible de délocaliser « vers ailleurs » ; ce sont alors des travailleurs qu’on importe, avec des normes salariales abaissées, qu’ils acceptent, parce qu’ils n’ont pas le choix. Face à cette dynamique néfaste, l’Europe n’est malheureusement pas une protection ; elle y joue plutôt un rôle d’accélérateur.

Changer de paradigme

Le Ciré et ses associations membres sont en phase de réflexion : n’est-il pas temps de changer de paradigme, radicalement, en ouvrant là où, aujourd’hui, on ferme et en fermant là où on ouvre ? En l’occurrence, il s’agirait de troquer une police des frontières contre une police de l’emploi. Autrement dit : aujourd’hui, l’Europe est engagée dans une politique sécuritaire extrêmement dure, violente, et qui a un coût énorme, pour empêcher des personnes de passer aux frontières ; par contre, il n’y a pratiquement pas de contrôle de l’activité et du marché du travail. Le principe serait d’inverser complètement la priorité et l’affectation des moyens. On ne peut qu’être frappé par le fait que les biens et les capitaux circulent librement, mais pas les humains. La Déclaration universelle des droits humains consacre un droit d’émigrer En son article 13 , alors qu’à aucun moment elle ne prévoit son complément : le droit d’immigrer. Cela a des conséquences dramatiques pour le droit d’asile : de très nombreuses personnes qui ont pourtant urgemment besoin de protection n’arrivent pas jusqu’à nous, parce qu’elles meurent en route, ou se font refouler à la frontière. Bref, poursuivre dans la politique de fermeture des frontières ne protège pas les travailleurs et est porteur de son lot quotidien de violences, de morts et d’injustices sociales peu défendables. Concrètement, le changement de paradigme reviendrait à :

  • Réguler la circulation des biens et des capitaux, c’est-à-dire empêcher qu’elle s’effectue au seul profit de quelques-uns, et ouvrir à la circulation des Hommes.
  • Compléter la Déclaration universelle des droits humains par un droit d’immigrer.
  • Remettre l’économie au service des collectivités.
  • Réguler le marché du travail belge, européen, international.

La réflexion ne consiste pas à dire : « on ouvre et on laisse faire », car il y a des conditions à rencontrer pour que la liberté de circulation fonctionne bien, sans contribuer au dumping social et à l’abaissement des normes :

  • L’égalité des droits doit être un principe non négociable.
  • Il faut tenir compte du caractère national des droits sociaux et du fait que ces droits « créance » ont des caractéristiques territoriales et temporelles.

Pour réussir la deuxième condition, il faut aussi définir des conditions de résidence pour l’accès aux droits sociaux. Il s’agit en effet d’éviter que, par la simple prise du Thalys, on puisse s’ouvrir des droits sociaux le matin à Paris, à midi à Bruxelles, et l’après-midi à Amsterdam ! La définition de ces conditions de résidence pourra s’inspirer d’un demi-siècle de construction des mécanismes européens de coordination, qui repose sur trois grands principes : l’égalité de traitement ; l’unicité de la législation applicable ; le maintien des droits acquis ou en cours d’acquisition. En synthèse, il conviendra de resituer le problème et de ne pas se tromper d’ennemi. Les migrations sont le symptôme des fractures du monde. C’est aux fractures qu’il faut s’attaquer, pas aux symptômes, car elles ne sont ni le fruit du hasard, ni une fatalité : elles sont la résultante de choix politiques et économiques qui ont été faits, et qui, donc, peuvent être défaits.