Retour aux articles →

« La confiance en soi numérique est une question genrée »

Vie féminine est une association féministe d’éducation permanente, présente à Bruxelles et en Wallonie. Les animatrices sont en contact direct avec des femmes, le plus souvent précarisées et parfois victimes de violences. Lors du confinement, les travailleuses ont dû faire appel à leur créativité pour maintenir ce lien fragile entre les femmes. La fracture numérique et le manque de confiance en soi face aux nouvelles technologies ont représenté des obstacles majeurs.
Cette interview a paru dans le n°120 de Politique (septembre 2022).

Vous êtes toutes les deux actives en région liégeoise. Pourquoi est-ce important pour Vie féminine d’être présente à Liège ?

ANNE FONTINOY : Vie féminine doit être présente partout, et donc aussi à Liège, parce que plus nous serons en connexion avec les réalités des femmes, avec toutes les réalités des femmes, plus nous serons un mouvement fort et plus nous aurons un poids politique. Par ailleurs, il y a des spécificités à Liège.

SANDY SIMONI : Il y a effectivement des particularités à Liège, par exemple nous avons célébré l’anniversaire de la grève de la FN[1.La grève des femmes de la FN Herstal est une grève menée en 1966 par les ouvrières de la FN Herstal dans la ville du même nom, près de Liège. « À salaire égal, travail égal » était la principale revendication des ouvrières de la fabrique d’armes. Elle dure plusieurs mois, du 16 février au 10 mai 1966. À l’issue des pourparlers, un accord de protocole est établi, qui octroie une augmentation horaire de 2 francs à la reprise et une augmentation de 0,75 franc au 1er janvier 1967 (réduites par rapport aux demandes des travailleuses), ainsi qu’une réduction du temps de travail d’une heure le 1er mai.]. Ceci dit, au final, on se raccroche toujours à des réalités communes à toutes les femmes. Nous pouvons parler avec toutes les femmes du travail reconnu, du travail non reconnu, du salariat. Tout cela se croise, même si, à Liège, il y a une histoire ouvrière importante. Beaucoup d’initiatives à ce sujet ont commencé à Liège et quand on parcourt notre histoire ‒ car Vie féminine a cent ans ! ‒ on constate vraiment cet aspect historique fondamental lié à cette région.

Votre travail est de rester en contact avec les femmes pour pouvoir faire remonter leurs réalités et dénoncer les violences qu’elles subissent. Comment cela s’est-il passé lors du confinement dû à la pandémie de coronavirus, alors que nos vies se numérisaient rapidement ?

ANNE FONTINOY : Il y a d’abord eu l’obligation d’exercer du télétravail, qui est apparue très rapidement lors du confinement. Certaines femmes n’ont pas su s’adapter à ce changement, elles sont restées à la traîne. Nos animatrices sont restées en contact avec elles du mieux qu’elles pouvaient, notamment par téléphone. Puis, il y a eu une petite période de déconfinement de quelques mois, qui nous a permis de mettre en place un temps de formation pendant lequel les femmes ont pu venir pour mettre à jour leurs appareils électroniques (smartphone, tablette ou ordinateur…), pour être prêtes en cas de reconfinement à la maison.

Et cela a été le cas, puisque nous avons été reconfinées par la suite. Avec celles qui avaient les appareils mis à jour, avec les programmes nécessaires, nous avons alors pu garder un contact. Avec toutes les autres, cela s’est avéré beaucoup plus compliqué. On a vraiment constaté concrètement cette fracture numérique[2. C. Wernaers, « Confinement : les femmes sont plus touchées par la fracture numérique », Les Grenades-RTBF, 19 avril 2020. Voir aussi les articles sur le SLPPE et les EPN dans ce dossier.]. Les femmes ne pouvaient plus entrer en contact avec nous qu’avec un téléphone… quand elles en avaient un. Il a fallu trouver des trucs et astuces. Nous avons compris que notre rôle était d’agir sur cette question, mais dans les deux sens : défendre le fait qu’il faille entrer dans le système numérique ‒ c’est l’avenir, on ne peut pas le nier ‒ sans laisser de côté toutes celles et tous ceux qui ne pourront pas entrer dans cette ère numérique !

SANDY SIMONI : Nous avons identifié différentes fractures. Pendant le confinement, nous avons facilement pu rester en contact avec les femmes qui maîtrisaient déjà l’outil numérique. Nous avons simplement un peu galéré à lancer la première visioconférence ou à allumer une webcam, et nous avons dû nous mettre d’accord sur des règles de réunion communes, comme ne pas réprimander ses enfants avec le micro ouvert. Pour le reste, on arrivait à s’en sortir avec elles, à communiquer, même via WhatsApp. Le numérique nous a permis de garder ces liens. Mais il y a aussi d’autres femmes, divisées en deux catégories : d’abord celles qui n’avaient tout simplement pas l’outil. Rappelons-nous, les familles étaient confinées toutes ensemble, parfois dans des lieux exigus, avec le seul ordinateur portable disponible utilisé par le plus petit pour suivre un cours, la réunion Vie féminine passe alors bien après l’école du petit. Cette absence de matériel était flagrante, de ce fait énormément de femmes ont disparu. Nous travaillons avec un public précaire, cette question d’accès au matériel est donc capitale.

Ensuite, si certaines femmes possédaient bien les outils, elles étaient terrorisées à l’idée de faire une bêtise ! Elles se disaient qu’elles allaient abîmer leur ordinateur, elles avaient peur d’installer un virus… Cela nous a amenées à réfléchir à la confiance en soi numérique. L’absence de matériel est assez connue aujourd’hui quand on parle de fracture numérique. Ce qui est nouveau, selon nous, et qui est apparu avec cette crise, c’est le fait que même si elles possèdent le matériel, certaines femmes ne savent pas toujours comment l’utiliser. Cette confiance en soi numérique constitue vraiment une question genrée parce qu’on ne socialise pas les femmes et les filles à utiliser l’outil numérique comme on apprend aux garçons à se sentir à l’aise avec la technologie. Il y a un bug au niveau de l’apprentissage du numérique aux femmes. Et nous avons constaté que cela les affecte toutes : les très jeunes, les aînées, des femmes natives francophones ou des femmes qui apprennent le français. Elles sont touchées de manière différente : si vous n’êtes pas à l’aise avec la machine mais qu’en plus elle est paramétrée en français, alors que vous ne maîtrisez pas cette langue, cela commence à faire beaucoup ! Des femmes ne comprenaient pas quand on leur demandait de prendre la souris pour cliquer sur une icône, cela ne voulait rien dire pour elles alors que cela semble faire partie de notre langage usuel.

ANNE FONTINOY : Pendant la crise sanitaire, il y avait aussi cette obligation d’aller sur Internet pour chercher des documents administratifs fondamentaux, puisque tous les services étaient fermés. Rien que pour le vaccin par exemple, il fallait activer son rendez-vous en ligne, et cela a été très difficile, même pour celles qui possédaient un smartphone. Elles se disaient qu’elles n’avaient pas les capacités intellectuelles d’y arriver. Finalement, après les avoir guidées, évidemment qu’elles y arrivaient ! Nous avons créé des tutoriels qui permettaient de ne pas devoir se répéter. Aujourd’hui, cela nous aide toujours. Le tout numérique va néanmoins poser problème, il faut s’interroger à ce sujet. Même pour quelqu’un qui a l’habitude d’aller sur Internet comme moi, c’est parfois insupportable.

SANDY SIMONI : Nos animatrices étaient confrontées à des femmes qui venaient avec des dizaines de fiches de remboursement pour la mutuelle que le médecin leur avait données, car elles ne savaient pas quoi en faire. On ne pouvait effectivement plus les déposer physiquement. Cela représente de l’argent auquel elles ont droit, alors qu’elles sont en situation de précarité. Cette crise ne les a pas conduites à activer leur droit, c’est certain. Il y a pourtant tout ce discours de modernité, on utilise moins de papier grâce au numérique, etc. Certaines institutions disent qu’elles mettent à disposition une plateforme numérique avec une certaine ergonomie, mais les plateformes ne sont jamais les mêmes ! On nous donne des codes d’accès et puis on doit se débrouiller, mais combien de personnes cela laisse-t-il sur le carreau ? Il n’y a pas eu d’accompagnement pédagogique, il n’y a pas eu de prise en compte des spécificités des publics précaires et encore moins des femmes… Or, quand on n’accompagne pas, on exclut. Cela nous a posé des vraies questions car nous nous sommes retrouvées, en tant que travailleuses à Vie féminine, à aider les personnes à utiliser ces plateformes, notamment bancaires, et à accéder à des données privées que nous ne devrions pas consulter ! En même temps, personne d’autre ne s’en occupait pendant les confinements… Des femmes étaient en retard de paiement de leur loyer car elles allaient toujours faire leur virement à la banque, ce qui n’était plus possible. Elles éprouvaient une immense angoisse, nous n’allions pas les laisser seules dans cette situation ! Comment cela se fait-il que ce soit à une animatrice de Vie féminine de s’en occuper ? En termes éthiques, cette situation est hallucinante.

Cette charge a en fait reposé entièrement sur les épaules des associations de terrain qui ont dû effectuer ce travail d’accompagnement pédagogique avec leur public, en avez-vous parlé entre associations ?

SANDY SIMONI : Aujourd’hui, nous pouvons penser à autre chose que survivre et donc ce sont des choses qui remontent dans nos plateformes qui regroupent différentes associations. Les institutions se sont appuyées sur le travail invisible des associations. Nous avons dû bosser pour le capitalisme, il y a quelque chose qui ne va pas dans cette situation. Des grosses entreprises ont décidé de se digitaliser et si vous ne suivez pas le mouvement, il vous faudra trouver quelqu’un pour faire le travail d’accompagnement. C’est un vrai impensé qui a énormément reposé sur la débrouillardise des animatrices, sur le fait qu’elles-mêmes pouvaient gérer ces questions ou pas !

Et vous avez notamment mené ce travail d’accompagnement numérique de votre public car il était fondamental pour vous de garder ce contact avec les femmes ?

SANDY SIMONI : Nous n’avions pas de pression de la part du gouvernement pour continuer nos activités. Il s’agissait d’années blanches au niveau de la justification des subsides. Cependant, nous savions que des enjeux majeurs allaient apparaître durant cette crise. On le voyait dans les pays qui avaient confiné avant nous. Les mouvements féministes des autres pays nous ont notamment alertées sur l’augmentation des violences faites aux femmes durant les confinements[3. C. Bordecq, « Femmes italiennes confinées au temps du coronavirus : “L’urgence a amplifié les inégalités et les oppressions” », axelle magazine, 16 mars 2020. Voir aussi Les Grenades-RTBF, « Dans le monde, les violences envers les femmes explosent depuis la pandémie », 23 novembre 2020.]. On connaît très bien notre public, les animatrices sont présentes physiquement dans leurs antennes, elles savent quelle femme est en danger quand elle reste à la maison[4. C. Wernaers, « Violences masculines en période de confinement : “Personne ne viendra m’aider” », axelle magazine, 23 mars 2020.], laquelle vit avec cinq enfants dans un appartement deux pièces en plein soleil sans accès à un jardin. On s’est dit qu’il ne fallait surtout pas qu’on lâche durant cette période, même si on allait perdre contact avec certaines. On savait que nous serions les dernières à rester ouvertes et accessibles, d’une manière ou d’une autre.

C’était un enjeu vital pour les animatrices, de réussir à garder ce lien à tout prix. Nous avons beaucoup communiqué sur les réseaux sociaux en ce sens. Et parfois, il a fallu être inventive, un groupe de femmes s’écrivaient et s’envoyaient des cartes postales, nous avons formé des chaînes de l’amitié, etc. Peu importe le moyen, nous voulions leur montrer qu’elles n’étaient pas seules. Certaines femmes réfléchissaient à la violence dans leur couple et à ce qu’elles souhaitaient faire, elles se sentaient enfin assez fortes, et puis le confinement est arrivé et ce n’était plus le moment de quitter leur conjoint. Cela n’a pas été facile. Des femmes nous appelaient en nous disant : « Ça y est, je le quitte, où est-ce que je peux aller ? ». Et nous n’avions pas d’endroit disponible pour elles, le réseau était saturé pendant tout un temps. Ce sont des situations que nous avons rencontrées. Nous avons également célébré le centenaire de Vie féminine pendant cette période, nous avons organisé des balades en extérieur avec les femmes du mouvement, pour marquer le coup. Nous avons marché cent kilomètres pour les cent ans, mais au final nous avons marché beaucoup plus. Les femmes se trouvaient par groupe de trois ou de quatre, selon les règles sanitaires en vigueur.

Pendant ces temps, nous nous sommes rendu compte qu’elles s’échangeaient des informations, des techniques, des conseils. Dès qu’on mettait les femmes ensemble, les échanges apparaissaient. D’habitude, ils survenaient assez spontanément dans nos lieux, mais à cause du coronavirus, il a fallu travailler pour continuer à les rendre possibles. Il est ici important de dire que les conseils ne viennent pas uniquement des animatrices, mais surtout des femmes elles-mêmes, qui ont toutes des ressources à partager.

Comment cela se passe-t-il maintenant que le confinement est terminé ? Vous mentionniez des femmes qui ont complètement disparu des radars face à cette fracture numérique, est-ce que vous arrivez à nouveau à les contacter ?

SANDY SIMONI : C’est très variable, mais les animatrices continuent à dire que certaines ne sont pas revenues et ne reviendront pas. Nous avons donc perdu des femmes en route. Nous constatons que c’est souvent lié à des problématiques de santé mentale, qui étaient peut-être préexistantes mais qui ont trouvé un terrain favorable durant le confinement. Pendant le confinement, certaines animatrices devaient appeler des femmes juste pour être sûres qu’elles se levaient le matin. Je pense à une en particulier qui angoisse toujours à l’idée de sortir de chez elle. On atteint là les limites de ce que nous pouvons faire, nous faisons appel à notre réseau, mais nous ne sommes pas là pour la faire sortir de force de chez elle. D’un autre côté, nous avons touché d’autres femmes avec l’utilisation du numérique : une animatrice à Verviers a expliqué qu’une Montoise les rejoignait lors des réunions en ligne. Elle ne serait jamais venue si la réunion avait eu lieu en présentiel, à cause du temps de déplacement. Il y a eu des synergies et des projets en commun qui sont nés de cette période.

Aujourd’hui, vous souhaitez travailler sur la confiance numérique avec les femmes, expliquez-nous.

SANDY SIMONI : Nous allons commencer à donner des formations. Pas sur le thème « comment lancer une visioconférence », car ce besoin-là est déjà dépassé. Nous nous intéressons plutôt à l’utilisation des logiciels de base, qui n’est pas innée pour notre public. Il y a une vraie diabolisation de l’outil ordinateur. Nous allons par exemple expliquer comment utiliser Itsme[5. Itsme est une application d’identité mobile qui permet aux citoyen·nes belges de se connecter à des plateformes du gouvernement, des banques, des assureurs et d’autres entreprises privées. Elle permet également de signer des documents officiels de manière numérique.], expliquer qu’il ne faut pas en avoir peur. Notre objectif final est, dans nos antennes, de mettre à disposition des femmes des ordinateurs portables. Ce seront des espaces de consultation d’Internet non contrôlables par leur entourage. Si ces formations sont possibles, c’est parce que nous avons trouvé du financement pour pouvoir travailler avec un partenaire et acheter du matériel informatique ; la question financière reste importante. Parmi les partenaires d’insertion professionnelle qui font de l’initiation aux nouvelles technologies, il faut préciser que l’angle du genre n’est pas évident du tout. Certains partenaires potentiels ne comprenaient pas pourquoi on demandait spécifiquement une formatrice, et non un formateur. Nous travaillons en non-mixité donc pour nous, c’est évident ! Avoir un formateur masculin qui nous explique comment utiliser les nouvelles technologies n’est pas neutre. Ils vont peut être y réfléchir maintenant, car nous n’avons pas signé avec eux !

Est-ce que cette période a modifié vos pratiques de travail hors ligne ?

ANNE FONTINOY : Durant le confinement, nous avons remis en place une vraie boite aux lettres, pas une boite mail ! Les femmes pouvaient y déposer leurs documents pour demander l’aide des animatrices. C’est une pratique que nous allons conserver car de nombreuses femmes victimes de violences sont traquées en ligne. Elles peuvent aujourd’hui toujours déposer leurs demandes dans la boite aux lettres et nous les recontactons d’une manière qui ne laisse aucune trace numérique. Internet, les sms, WhatsApp, cela laisse des traces partout. On ne vous révélera pas toute notre stratégie pour que les femmes puissent quand même recevoir de l’aide hors ligne. Il ne faut pas que les hommes connaissent toutes nos manières de travailler.

Des violences patriarcales et masculines s’exercent-elles au travers des écrans ?

ANNE FONTINOY : Oui, et elles ont augmenté pendant le confinement. Pensons par exemple aux injonctions faites aux femmes de rester belles, d’être maquillées et épilées pour les réunions en ligne. Nous avons aussi constaté que les hommes cherchaient des femmes, simplement parce qu’elles n’étaient plus dans la rue.

SANDY SIMONI : Tout d’un coup, l’espace public, au sens usuel du terme, avait disparu. Internet est devenu l’espace public. Tout ce que les femmes nomment comme étant des violences sexistes dans l’espace public s’est donc retrouvé en ligne. Il y a aussi les violences entre partenaires. Il faut être nuancées à ce sujet : la technologie permet aux femmes d’accéder à certaines informations, d’alerter et de se mettre en sécurité. Néanmoins, au travers de l’outil numérique, il peut y avoir un effet de traque, de surveillance, une pression qui s’exerce. Quand nous sommes dans des maisons d’accueil pour femmes victimes de violences, on constate que les téléphones vibrent sans arrêt parce qu’elles sont contactées par le conjoint ou ex-conjoint, sur toutes les applications imaginables, pour les forcer à répondre. On pourrait leur dire qu’elles n’ont qu’à changer de numéro, mais il s’agit parfois de leur dernier lien avec certaines personnes qu’elles ne veulent pas perdre, c’est le numéro pour l’école de leurs enfants, etc. C’est un morceau de leur identité, tout comme leur profil sur les réseaux sociaux, qui leur appartient.

Et puis, il ne suffit pas qu’elles suppriment leurs comptes pour ne pas être violentées. Un auteur de violence trouvera toujours un moyen d’exercer ses violences. L’outil numérique permet de poursuivre les violences qui se passent hors ligne. C’est une manière d’exercer sa domination sur l’autre.

Entretien mené le 6 avril 2022 et retranscrit par Camille Wernaers.

(Image de la vignette et dans l’article sous  CC BY-SA 4.0 ; photographie d’une femme qui utilise un ordinateur, prise lors d’un atelier sur Wikipédia par le collectif CherchezLaFemme en mai 2018.)